L’église, un lieu pour accueillir les réfugiés

Il y a plus d’un an déjà, soit en novembre 2021, la famille Ramirez Sanchez, d’origine mexicaine, est arrivée à l’église Plymouth-Trinity de Sherbrooke pour y « demeurer ». Cette pratique n’est pas nouvelle pour les chrétiens, d’ouvrir les portes de leurs églises pour accueillir les personnes persécutées qui viennent s’y réfugier. Saint-Augustin en relate la pratique dans son livre La Cité de Dieu. Cette pratique n’est pas seulement un « à côté », « bonne » mais « non essentiel » à la pratique chrétienne, elle est l’essence même de notre foi. Cette pratique d’accueil trouve ses fondements dans les deux testaments et elle met l’accent sur un aspect spécifique de l’hospitalité, soit : protéger la personne qu’on accueille. Être hospitalier pour un chrétien ce n’est pas seulement inviter des amis à partager sa table ou leur offrir le gîte lorsqu’il est trop tard pour rentrer chez eux. L’hospitalité chrétienne c’est accueillir la femme violentée et la protéger de son, ou ses, bourreaux,[i] et c’est aussi protéger l’enfant qui vient vivre parmi nous.[ii]   

Relevons ici un passage biblique dans lequel l’hospitalité pratiquée fut un acte de protection envers celui qui était venu trouver refuge. Prenons l’exemple des deux anges venus à la ville de Sodome qui furent accueillis par Loth.[iii] Ce dernier insista auprès d’eux afin qu’ils passent la nuit chez lui, alors les hommes de Sodome vinrent chez Loth et réclamèrent qu’il laisse sortir les deux hommes « afin de les connaitre », c’est-à-dire d’avoir des rapports sexuels avec eux. Loth sort de chez lui et exhorte les sodomites de ne leur faire aucun tort, il les protège, et ce au péril de sa propre intégrité, car « [les hommes de Sodome] répondirent : « Tire-toi de là ! » et ils dirent : « Cet individu est venu en émigré et il fait le redresseur de torts ! Nous allons lui faire plus de mal qu’à eux. » Ils poussèrent Loth avec violence et s’approchèrent pour enfoncer la porte. »[iv] Même aujourd’hui, les États et la société civile ont encore de la difficulté à comprendre la violence sexuelle comme une cause de refuge, et pourtant déjà dans l’Ancien Testament on parle d’offrir l’hospitalité à ces hommes que les gens de la ville de Sodome veulent vraisemblablement violer.

Il est très encourageant de voir que ces principes bibliques qui font partie de la tradition chrétienne sont encore pratiqués de nos jours. Bien que certains chrétiens conçoivent la mise en application des fondements bibliques à travers une pratique morale individuelle, d’autres chrétiens voient la mise en application de l’enseignement biblique par des actions de justice envers des exclus et des marginalisés.

L’Église Plymouth-Trinity de Sherbrooke et son pasteur Samuel Dansoko se sont engagés à pratiquer l’hospitalité en connaissant les risques que cela comporte. En accueillant la famille venue s’y réfugier, la paroisse de l’Église Unie contribue à les protéger de toutes formes de violence par lesquelles ils sont menacés dans leur pays. Le fait qu’ils habitent dans une église rend la tâche du renvoi délicate pour les autorités canadiennes. Jusqu’à ce jour, cela ne donne pas bonne presse de forcer les portes d’une église. Cette action d’hospitalité de la part de chrétiens est un témoignage fort d’une foi qui est à l’œuvre et ce sont ces gestes qui nous font voir que la foi en Christ a encore une pertinence aujourd’hui.

[i] Passage de la lapidation de la femme pécheresse.

[ii] Tel fut le cas de Jésus à sa naissance Mt 2.

[iii] Genèse 19,1-11.

[iv] Genèse 19,9