Dans cet épisode, Joan et Stéphane se demandent si l’Église peut parler de sexe sans être hypocrite.
Ils explorent ce que la bible dit sur la sexualité. Ils se questionnent si le sexe peut être considéré comme un péché. Ils affirment que les abus sexuels dans l’Église doivent être toujours dénoncé.
Transcription
Table des matières
Bonjour, bienvenue à Question de croire, un podcast qui explore la foi et la spiritualité une question à la fois. Cette semaine, pourquoi la sexualité obsède-t-elle tellement la religion?
Pourquoi parler de sexualité dans les Églises
Bonjour ! Bonjour Joan ! Alors c’est vrai Stéphane, c’est-à-dire, c’est vrai que le fait de parler de sexualité dans nos Églises par exemple, eh bien ça ne coule pas de source. Je m’en étais toujours rendu compte, même si je venais d’un milieu assez libéral où on pouvait parler de pas mal de choses.
Et puis après j’ai eu des enfants, je m’en suis encore plus rendu compte. Et là, j’ai eu une sacrée surprise il y a quelques semaines, parce que lors du tout petit comité de rédaction de la communauté francophone de l’Église réforme et de Zurich, pendant cette séance-là, comme on dit en Suisse, cette réunion-là, Vérena, qui est notre doyenne dans cette réunion et qui a déjà un âge assez respectable, d’ailleurs qui est très respecté dans la communauté.
Verena nous a dit « Vous savez, il y a un sujet auquel je pense depuis très longtemps, peut-être même depuis que je suis jeune, et j’aimerais une bonne fois pour toutes qu’il soit abordé en église, et c’est celui de la sexualité. » Et de voir Vérena, que je salue au passage, qui est vraiment l’une des femmes les plus respectées, elle a déjà été présidente d’église, elle siège dans toutes sortes de commissions importantes pour notre communauté, pour sa survie aussi économique.
De voir qu’elle nous disait ça d’un air fort, fort sérieux et qu’elle nous a donné beaucoup d’exemples de sa jeunesse, des exemples dans lesquels elle soulignait d’ailleurs une certaine hypocrisie.
En disant, en fait, il y a toujours eu des questions de sexualité, mais on nous a toujours dit que c’était mal d’en parler. Et elle-même, j’espère que je ne parle pas trop à sa place, mais elle-même nous a dit qu’en étant jeune, on lui avait répété qu’il fallait arriver vierge au mariage, et encore maintenant, elle ne comprenait pas très bien pourquoi c’était l’affaire des pasteurs, la virginité des jeunes filles au mariage.
Moi non plus d’ailleurs, je ne comprends pas très bien en quoi ça nous concernerait, nous les pasteurs, les ministres, si des gens arrivent vierges ou pas au mariage. Et puis d’ailleurs, je pense que dans l’immense majorité des cas, si on devait poser la question, on les ferait fuir plus qu’autre chose.
Le manque de crédibilité de l’Église sur la sexualité
C’est très intéressant cette réflexion pour une personne comme moi qui a grandi dans un milieu catholique romain. On avait des prêtres célibataires qui parlaient, qui conseillaient, qui jugeaient la sexualité des gens. Et souvent, ce qu’on entendait, mais quelle est leur crédibilité? Qu’est-ce qu’ils connaissent dans la sexualité, même dans le mariage, dans les relations de couple?
En même temps, j’ai grandi dans un petit village, tout le monde savait qui était la maîtresse du prêtre. C’était connu, c’était su, c’était discuté et il y avait cette hypocrisie-là qu’on en parle peut-être en petits groupes. Tout le monde le sait, mais on essaie de faire semblant.
Donc, toute cette vision un peu malsaine d’un homme qui prêche une chose et qui fait l’autre, c’était un peu bizarre.
L’hypocrisie au sujet de la sexualité
Mais tu vois, Stéphane, est-ce que tous et toutes, dans une certaine mesure, on n’a pas un rapport hypocrite avec ça? Parce que, tu vois, il y a quelques années, j’avais une intervention à faire un peu loin, donc j’ai pris mon char, comme vous dites. mon auto, comme disent les Suisses, ou ma voiture, comme disent les Français.
Et je m’en suis asallée, et au retour j’avais très envie de dormir, donc j’ai allumé ma radio, et je suis tombée sur une radio jeune. Une radio dont je sais que mes filles écoutaient.
Arrive le moment du docteur. Alors c’est un docteur complètement cinglé qu’on a en France, qui foule. il écoute toutes les questions des jeunes et puis il se moque un peu d’eux, il se fout un peu de leur gueule des fois en disant arrête tes conneries et tout le monde sait mettre une capote et tout, mais d’un autre côté il les écoute.
Et ce soir-là, enfin cette nuit-là, il y avait un jeune qui est venu avec une histoire très compliquée de douleurs à l’anus. C’était compliqué comme tout, il y avait des tas de détails, moi j’en pouvais plus !
Et puis le docteur tifoule qui lui demandait encore des détails. Oui mais alors voilà quand tu as lavé, ceci, cela… Enfin c’est parti vraiment dans la consultation médicale. Et à la fin le jeune était vraiment content d’avoir reçu tous ses bons conseils et puis l’autre lui a dit et puis dorénavant tu sauras que tu peux pas tout introduire dans ton anus sans certaines précautions.
Donc je suis arrivé chez moi, j’ai garé la voiture, j’ai monté les deux étages mais 4 à 4, mais comme une fusée. J’ai débarqué dans la chambre de ma fille parce que je savais qu’elle écoutait cette radio. Là elle me regarde. d’un air un peu inquiet, il était 22h30 ou comme ça.
Et je lui dis, Marisol, est-ce que tu écoutes toujours Docteur Tifoul des fois le soir sur la radio ? Elle me dit, mais qu’est-ce que t’as là, ça va pas bien quoi, t’es toute rouge, toute énervée. Je lui dis, je veux savoir si tu écoutes cette radio ou pas. Elle me dit, mais calme-toi, assis-toi, 14 ans.
Je lui dis, parce que là, je viens d’entendre un gamin qui a expliqué des tas de problèmes d’anus à propos de ses relations sexuelles, et franchement, je me demande si c’est des bonnes choses à écouter quand on a 14 ans.
Là, elle me regarde et elle me dit « Maman, toi tu soutiens le planning familial ? » « Oui, oui. » « Puis tu soutiens le fait que chacun, chacune ait accès à des informations ? » « Oui. » « Et ben alors, de quoi tu te plains ? Ce jeune-là, il a eu un adulte qui lui a répondu, il a un problème d’anus. Ben écoute, maintenant, il saura comment faire. Bon, puis maintenant, laisse-moi dormir. Arrête avec tes bêtises. »
Et là j’ai pensé, mais c’est vrai, moi-même je suis hypocrite. C’est-à-dire qu’en fait, je me dis voilà, le corps est un temple, c’est Dieu qui nous a créés, il faut prendre soin de soi, et c’est peut-être pas une très bonne idée quand on est un jeune et qu’on découvre sa sexualité, puisque le jeune qu’avait appelé, je sais pas s’il avait 17 ans ou 19 ans.
Est-ce que c’est une bonne idée d’introduire des choses dans son anus ? Mais après tout, c’est son corps à lui. Et là, il a trouvé quelqu’un qui peut le conseiller. Et moi, pourquoi est-ce que je pars. En panique directe et je me dis. « Ah, ça va être mauvais, il. Faut que j’en parle à ma fille ». Et j’ai bien compris dans son regard qu’elle pensait que j’étais complètement hypocrite.
Au-delà de la sexualité pour la reproduction
Parfois, j’ai l’impression que dans les milieux d’Église, dans l’univers dans lequel on baigne, toi et moi, il y a cette distinction entre le sexe utile et le sexe pour le plaisir. Le sexe utile, bon, la reproduction ou, bon, dans les liens du mariage, quelque chose de socialement accepté.
https://moncredo.org/etre-ou-ne-pas-etre-mere/Et cette sexualité qui fait partie de ce qu’on est en tant qu’être humain, que l’on choisit, qu’on définit autant qu’on peut. On a encore de la difficulté lorsqu’on s’extrait de cette construction de la famille nucléaire: le papa, la maman, mariés, les deux enfants, la vie de banlieue, une espèce de modèle arbitraire. Tandis qu’il y a plein de gens qui vivent plein d’autres choses.
On n’a pas à juger de ça. Tout ce que moi, je veux savoir, est-ce que c’est consentant? Est-ce que ça se fait dans l’amour? Après ça, bof, qu’est-ce que ça change à ma vie?
Le débat du mariage pour tous et toutes
Ce que tu dis là, je l’ai beaucoup vécu dans mon église d’origine, l’Union des églises protestantes d’Alsace-et-Lorraine, qui est l’Église que je connais finalement le plus de l’intérieur. Lors des débats en paroisse sur l’égalité. Au mariage pour tous et toutes. C’était des débats longs, des débats fastidieux. Souvent des débats qui étaient blessants pour les personnes concernées qui venaient là.
Et je me rappelle être intervenue dans une assemblée de pasteurs. Et après ma petite intervention pour leur. Expliquer que de mon point de vue l’évangile est inclusif et que Jésus serait. Tout simplement heureux qu’on accepte tout couple consentant qui veut prendre un engagement d’ordre spirituel devant une assemblée et devant Dieu.
Il est venu me voir à la fin et puis il avait beaucoup réfléchi à cette affaire. Et d’ailleurs, il avait toutes sortes de théories très intéressantes. L’eau qu’on boit étant polluée, il y a de plus en plus d’homosexuels. Enfin, il avait beaucoup d’idées sur la question.
Et il m’a dit, tu sais, moi, jamais je ne discriminerai un couple. Mais par contre, lors de l’entretien pastoral. Avant la cérémonie, je serais quand même. Bien embêtée parce que dans ma tête. Je me dirais il y en a. Un qui fait l’homme et l’autre qui fait la femme et donc forcément ils ont des rapports anaux et ça me. Dérangerait quand même d’imaginer que je vais faire une cérémonie pour des gens qui ont des rapports anaux.
Ce à quoi je lui ai posé une question toute simple. Je lui ai dit cher collègue donc si je comprends bien quand tu prépares des personnes à leur mariage dans ton Église, tu leur demandes s’ils ont des rapports anaux. Ça va pas la tête ou quoi ? Pourquoi je demanderais ça aux gens ?
Parce que visiblement, ce serait un frein. Ça t’empêcherait de bénir leur union. Donc moi, si j’étais toi, je poserais la question systématiquement à chaque fois que j’ai un entretien pour une cérémonie de mariage dans ton Église.
Mais il m’a regardé et il a été choqué par ma suggestion. Ce qui prouve bien, et ça c’est très intéressant, que 1. Un certain nombre de pasteurs n’ont aucune imagination puisqu’ils croient que… Ils croient que… ils croient que les couples hétérosexuels n’ont pas de rapport anaux.
Et deux, qu’ils croient tout à fait normal de discriminer entre un couple hétéro et un couple homo sur la base de ce qu’ils croient être la sexualité des autres.
Et ça nous amène directement à la Bible qui de bout en bout parle de viol, de rapports non consentis, de sexualité et bien entendu parfois aussi de rapports qui ont l’air heureux et consentis.
Mais comme on a extrêmement du mal à aborder ces questions-là avec un tout petit peu de sang-froid ou de bon sens, ce qu’on fait lors des mariages, c’est qu’on survalorise des récits érotiques d’un seul coup. Et c’est le Cantiques des Cantiques.
Et ça, ça m’agace complètement parce que soit on soupçonne les gens d’avoir des rapports anneaux et ce serait très très mal. Soit, au moment de leur mariage, peut-être qu’ils sont à une étape tout à fait initiatique, ils sont complètement dans quelque chose de très très romantique et pas du tout érotique, et on leur impose des récits qui parlent, des scènes qui sont comme ci comme ça, et puis des endroits cachés qui sont très humides, etc.
Et je trouve ça complètement obscène. Et ce déséquilibre, on le sent de bout en bout dès qu’on parle de sexualité en église. Tu parles de l’abîme.
Le rejet du côté charnel
Moi, ce qui me revient souvent en tête, c’est les écrits de Paul, ou du moins les écrits attribués à Paul, où Paul parle de lui, semble se présenter comme un célibataire endurci. Certaines personnes ont soulevé peut-être que c’était quelqu’un d’asexuel, pour reprendre les termes d’aujourd’hui. Ah ouais.
Mais cette idée que le spirituel, c’est ce qu’il faut rechercher et tout ce qui est charnel, c’est quelque chose de péché, c’est quelque chose de sale, c’est quelque chose qui mène à la chute de l’humanité, toute cette idée-là que si nous étions des êtres non sexués, nous pourrions être plus près de Dieu.
Et je peux comprendre, lorsqu’on assimile ce message sur des siècles, des millénaires. Arrive à une position inconfortable, on n’en sait plus trop quoi faire, on se gratte la tête, on va avec les raccourcis faciles, on blâme les femmes, c’est la faute des femmes si les hommes ne sont pas capables de se retenir, toutes ces conneries-là qu’on entend malheureusement encore aujourd’hui. et on est incapable, je crois, d’en arriver à un message sain, autant que respirer fait partie de l’expérience humaine, la sexualité fait partie de l’expérience humaine.
L’homosexualité et la Bible
Et c’est intéressant parce que notre grande fille, Marisol, qui est bien sûr mon initiatrice de vie, de plein de choses, qui est aussi bien sûr ma meilleure maîtresse en féminisme très contemporain, elle est étudiante en théologie.
Et là, elle est sur des questionnements éthiques, c’est-à-dire on les fait travailler un peu aussi la question de la bénédiction des couples homosexuels. J’ai l’impression que… On doit s’ennuyer, je sais pas, on parle de la même chose depuis dix ans. À un moment donné, peut-être qu’on va réussir à parler d’autre chose.
Mais là, elle m’a fait beaucoup rigoler parce qu’elle m’a envoyé des argumentaires contre. Et elle m’a dit, si je comprends bien, les gens qui sont contre le mariage homosexuel, ils se basent sur Genèse et donc sur le fait que Ève ait parlé avec un serpent. Et j’ai répondu oui, elle va parler avec un serpent qui lui a parlé aussi. Donc on se base sur des histoires de discussion avec des animaux. Alors elle m’a dit, ah mais oui, mais c’est tout à fait logique. Et puis après, du coup, ils ont mangé une pomme.
C’est vraiment marrant parce qu’avec un regard frais de quelqu’un qui a été élevé dans une culture très contemporaine, on voit que d’un seul coup, on survalorise symboliquement à des niveaux très éthiques, très fins, très complexes comme la sexualité humaine, un pseudo-dialogue entre un serpent et la première femme qui a mangé une pomme.
Et on comprend tout de suite qu’on ne peut pas rationaliser ça. Ce n’est pas une histoire qui est faite pour être rationalisée, c’est une histoire qui est faite pour nous emmener dans un univers culturel, dans une façon de penser, et pour comprendre que de tout temps Dieu nous a parlé.
Voir de la sexualité partout
C’est souvent le cas lorsque nous insérons nos références culturelles dans les textes bibliques. Pour prendre encore cet exemple-là, il y a des gens qui disent, ah, le serpent, bon, ça doit être le pénis d’un homme. Manger une pomme, ça doit être en référence à l’acte sexuel. Le péché d’Ève était-il un péché sexuel. Je l’ai lu encore récemment, ça. Au lieu de se dire, comme tu as dit, c’est une histoire qui raconte quelque chose.
Le texte ne fait pas ces liens. Le texte ne dit pas le serpent, entre parenthèses. L’objet d’un désir sexuel fait de la parenthèse. C’est pas ça. C’est nous qui semblons être obsédés parfois par ça. Et j’ai l’impression. Ça traduit un malaise.
Encore une fois, je reviens là-dessus, ça traduit un malaise. Comment certaines églises sont obsédées par tout ce qui se passe en bas de la ceinture. L’avortement, relations sexuelles prémaritales, masturbation, tout se résume à ça. Et naturellement, tout est interdit.
Les droits des personnes LGBTIQ+
C’est vrai qu’en valorisant l’expérience humaine, on fait preuve d’une agilité pastorale qui manque à nos églises. Et je remercie beaucoup Adrien Stiefel, qui a l’initiative d’un projet en ville de Genève, un projet lié à l’Église protestante de Genève, mais lié aussi à beaucoup d’autres actrices, et qui lui m’a dit « si tu fais un podcast, est-ce que vous allez à un moment donné parler de sexualité et de religion ? »
Parce qu’en fait, le cœur du ministère d’Adrien, qui vient d’un milieu civil à la base et non pas d’un milieu religieux, mais qui est maintenant au service de l’église protestante de Genève, à la base, c’était bien sûr les droits des personnes LGBTIQ+, et puis il a beaucoup œuvré, lui et toute son équipe, et avant aussi, lorsqu’il était en partenariat direct avec notre amie commune Carolina Costa, il a beaucoup œuvré, notamment pour la fin des pseudo-thérapies de conversion. Et ça c’est très important.
Mais sur son chemin d’accompagnement aussi pastoral, de ce qu’il explique, il s’est rendu compte que beaucoup de gens venaient d’églises où on ne parlait pas de sexualité. Et donc il y avait une vraie dichotomie, comme on le dit depuis le début de l’émission.
D’un côté ma vie de foi et de l’autre côté ma vie sexuelle. tout faire pour que ça ne se rencontre pas si ça ne rentre pas dans le fameux moule hétéronormatif mariage, enfant, chien, pavillon, dîme à l’église.
Et c’est épatant parce que Adrien du coup multiplie les initiatives comme par exemple faire dialoguer une travailleuse du sexe dos à dos avec une pasteur. Et chacune parle du désir par exemple dans sa vocation. Et donc des dialogues comme ça qu’on pourrait penser inopérants et qui en fait sont très féconds.
Et puis, ils les sèment, puisque maintenant aussi, dans le canton de Vaud, il y a un groupe arc-en-ciel, un groupe qui s’appelle Abras Ouvert, Le prochain sujet va être l’orgasme, les questions sur l’orgasme.
Et moi, je ne suis pas encore à cet endroit-là, dans ma catéchèse avec les enfants et les jeunes, dans mes milieux, dans lesquels j’ai la chance de servir, parce que je sais que pour le moment, ça pourrait être assimilé à une sorte d’initiation malvenue.
L’importance de l’éducation sexuelle dans nos Églises
Et pourtant, Dieu sait si nous avons besoin de faire de l’éducation sexuelle dans nos milieux auprès des jeunes. Peut-être qu’il y a une question de malaise par rapport à toute notre histoire institutionnelle, par rapport aux abus entre autres. Parce qu’il y en a eu. Personne, je crois, peut se dédouaner de dire pas chez nous, pas dans mon église.
Non, malheureusement, il y en a eu beaucoup. Ne serait-ce que d’aborder cette question à partir du consentement, du respect du corps avec des enfants, je crois que ça serait essentiel. On ne peut pas se cacher la tête dans le sable.
Et peut-être ça aussi, ça joue avec notre malaise, parce que ça nous confronte sur notre passé, sur tout ce qui s’est déroulé. Parce que bon, un pasteur, un prêtre, un membre du clergé qui a des relations consensuelles avec une autre personne, ça va.
Mais il y a tellement d’histoires où non, il y a des relations de pouvoir, il y a des choses malsaines, il y a des choses carrément illégales et abjectes. si on osait aborder un peu plus la sexualité, on serait obligé d’ouvrir cette boîte de Pandore et de dire peut-être notre refus de parler de ça, de ce sujet, je dirais pas est la cause, mais a contribué à une espèce de culture du silence chez les victimes d’actes et d’abus et d’agressions sexuelles dans nos églises.
Oui, c’est vrai qu’en fait, c’est vraiment le cercle. Là, on est dans un cercle vicieux. On n’en a pas parlé. Ça a créé une culture du silence et de l’hypocrisie.
Maintenant qu’il faudrait en parler, on n’ose pas trop en parler avec les enfants et les jeunes parce qu’on a peur, effectivement, que ce soit un lieu de déclenchement, d’inquiétude de la part des parents parce qu’eux-mêmes ont vu, entendu, subi des choses.
Et donc, finalement, voilà, on est dans un cercle qui est vicieux, qui n’est pas vertueux. Et partout, on baigne un peu dans cette difficulté. Alors, en France, la Fédération protestante de France vient enfin de sortir un document sur les VSS. Moi, je rajoute même un S.
C’est les violences spirituelles, sexistes et sexuelles. Alors voilà, j’ai rajouté mon petit S important pour qu’on ait un petit peu des… tous et toutes des critères, qu’on ait des démarches communes, qu’on sache sur quoi s’appuyer, peut-être aussi qu’on ait des documents.
Utiliser la Bible pour condamner la sexualité de l’autre
Et toutes les églises maintenant sont un petit peu dans ce genre de processus de dire, on ne peut pas utiliser la Bible pour condamner la sexualité des autres, mais on ne peut pas non plus utiliser la Bible pour dire qu’on n’en parle pas, on ne peut pas utiliser la Bible pour survaloriser je ne sais quel érotisme ou quel lien fraternel d’amour qui permettrait à certains d’embrasser sur la bouche d’autres sans consentement, voilà.
N’instrumentalisons pas la Bible qui n’est finalement pas tellement là pour nous donner des repères sexuels, mais qui est plutôt là pour. Nous aider toujours et encore à reconnaître en nous cette humanité, cette humanité qui a des fois des parts d’ombre et des fois des parts de lumière, et la sexualité peut faire partie des deux en fait.
Ça me fait penser au témoignage de Jean Villebas, qui est vraiment le fondateur du mouvement chrétien inclusif en France, et qui a toujours abordé les questions de sexualité, à la fois avec beaucoup de délicatesse, mais aussi beaucoup de franchise.
Et il m’a dit un jour, il parlait avec un chrétien très convaincu, qui se levait le matin, la Bible à la main, qui lui a dit, mais tu sais, je sais que tu as du péché en toi. Et Jean lui a répondu, c’est vrai, j’ai du péché en moi, mais ce n’est pas mon homosexualité, mon péché. Et toi aussi, tu as du péché en toi.
En fait, ce serait si simple de penser qu’un aspect de notre sexualité renferme tout notre péché. Le péché peut habiter toutes sortes de coins et de recoins de notre personnalité, mais pas nécessairement ceux pour lesquels on peut faire une liste facile. Et la grâce, du coup, habite aussi tous ces coins-là et tous ces recoins. Ça va ensemble, en tout cas en théologie luthérienne, ça va vraiment de pair.
Conclusion
Et donc j’espère vraiment qu’on arrivera surtout de plus en plus à tendre vers ce langage de grâce et d’enseignement du consentement, qui de mon point de vue est la toute première manifestation de la grâce dans la vie de quelqu’un, c’est-à-dire lui demander, as-tu le goût de, comme vous dites chez vous, as-tu le désir de ? Est-ce que toi et moi on vibre ensemble à cet endroit-là ou est-ce qu’on va chercher un autre endroit sur lequel vibrer, qui ne sera pas la sexualité mais qui sera aussi très chouette ?
Et merci encore, Adrian, de nous avoir interpellés et challengés. N’hésitez pas à retrouver Adrian sur ses différents réseaux sociaux, antennes LGBT de l’Église protestante de Genève. Et je remercie aussi toutes les personnes qui commencent à nous envoyer des suggestions. On apprécie beaucoup continuer. Ça nous nourrit, ça nous donne des idées et
Nous allons terminer cet épisode en remerciant notre commanditaire, l’Église unie du Canada. Envoyez-nous vos commentaires, questiondecroire@gmail.com, aimez, partagez, parlez-en à vos amis, peut-être sur l’oreiller. Merci beaucoup Johanne pour cette conversation. Merci à toi Stéphane et à très bientôt ! Bye bye !