Pourquoi faire de bonnes actions?
Stéphane Vermette
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Presque toutes les grandes religions font la promotion des bonnes actions.
Mais pourquoi devrions-nous le faire? Amadouer Dieu? Gagner notre place au ciel? Éviter la culpabilisation? Dans cet épisode, Joan et Stéphane explorent l’idée d’être sauvé par la foi et se demandent si les bonnes actions doivent toujours être visibles.
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Table des matières
Bonjour, bienvenue à Question de croire, un podcast qui aborde la spiritualité et la foi, une question à la fois. Cette semaine, pourquoi faire de bonnes actions si nous sommes sauvés par la foi? Bonjour Stéphane. Bonjour Joan, bonjour à toutes les personnes qui nous écoutent.
Reconnaître les bonnes actions dans nos vies
Alors c’est vrai, ça les bonnes actions. Les bonnes actions, c’est un sujet assez complexe parce que quand on est chrétienne, chrétien, personne non-binaire qui suit le Christ, souvent on aimerait savoir quoi faire pour être de bon chrétien.
Eh bien, des fois, on a envie de répondre un peu avec notre vocabulaire d’initié, qu’on appelle en francophonie européenne le patois de Canaan. Avec notre patois de Canaan, on aimerait bien dire aux gens, mais tu sais, tu es sauvé par la foi. Sauvé de quoi? Sauvé comment?
Alors, il y a cette petite histoire qui illustre cette idée d’être sauvé par la foi. C’est cette personne dont la maison brûle, alors c’est terrible, et puis j’espère que les personnes qui nous écoutent n’ont pas vécu pareil problème dans leur vie.
Une maison brûle et quelqu’un est dedans, et ça se termine mal pour cette personne.
Et puis alors cette personne arrive au paradis. Et arrivée là, cette personne a des récriminations bien sûr, puisqu’elle dit « mais enfin voilà, moi j’étais chrétienne, je faisais beaucoup de bonnes œuvres, je priais, et tu m’as laissé périr dans cet incendie. »
Et puis là, c’est saint Pierre en face, ou peut-être Jésus même, qui lui dit « Mais attends, Je t’ai envoyé d’abord les voisins qui ont essayé de te faire sortir de la maison, mais tu ne voulais pas sortir de la maison. Tu disais non, c’est Dieu qui va venir me sauver.
Et puis ensuite, je t’ai envoyé des pompiers qui sont venus avec leur véhicule tout simple parce qu’il était encore temps de te sauver. Et toi, tu priais, tu disais non, c’est Dieu qui va me sauver. Puis après, j’ai même envoyé un hélicoptère. Et toi, tu restais dans cette maison en feu, en train de prier, en train de dire non, c’est Dieu lui-même qui doit me sauver.
Alors c’est assez intéressant parce qu’on voit là que pour certaines personnes, il y a une emphase dans la prière, et donc seule la prière s’ouvrait. Mais finalement, qu’est-ce qui fait qu’on sent la présence de Dieu dans notre vie?
Et bien souvent, c’est parce que quelqu’un s’adresse à nous, quelqu’un s’occupe de nous, quelqu’un prend soin de nous, et c’est au travers des personnes finalement que s’incarne aussi le Christ.
Alors voilà, ça c’est un petit peu la morale de cette plaisanterie religieuse, mais ça ne répond pas à ta question. C’est vrai quoi, c’est quoi ça être sauvé par la foi?
Être sauvé par la foi et non les bonnes actions
Oui, peux-tu nous expliquer d’où ça vient cette idée-là chez les protestants d’être sauvés par la foi et non les œuvres?
On dit que la notion du salut par la foi, c’est un bel héritage qui nous vient directement de notre bienheureux réformateur Martin Luther, qui n’est pas Martin Luther King.
Parce que maintenant, avec les réseaux sociaux, des fois, tu vois des citations de Martin Luther et il y a marqué Martin Luther King. C’est assez drôle.
Il faut savoir qu’avant Martin Luther, avant d’être un réformateur, c’était un religieux.
Il enseignait la théologie, mais il vivait dans un monastère. Il avait un mode de vie très frugal, mais il avait des angoisses existentielles. Il avait peur de déplaire à Dieu, il avait peur de l’enfer, il avait peur de mourir en n’étant pas sauvé.
Et une nuit, alors qu’il traduisait, lisait, commentait l’Épitre aux Romains, il a eu une illumination et il s’est dit « mais je suis sauvé par mon baptême ». Je suis sauvée par grâce.
Ce baptême, je l’ai reçu étant bébé et je n’ai rien demandé. Et ce baptême m’a déjà sauvée dans le sens où le signe de l’amour inconditionnel de Dieu a déjà été posé sur ma personne par l’eau du baptême.
Alors là, tout de suite, on va se dire, est-ce que ça marche avec les bébés, etc.? Non. En fait, l’idée, c’est que le baptême, le baptême qui nous fait entrer dans la famille chrétienne, le baptême est un cadeau.
Jésus lui-même a été baptisé, donc on peut vraiment se dire que celui qui nous précède dans le fait de recevoir ce cadeau du baptême par grâce, c’est Jésus lui-même.
Et donc le fait de reconnaître qu’on reçoit de Dieu directement cet amour nous libère du fait de vouloir gagner notre vie, de vouloir être sauvés par nos propres efforts. On est déjà aimé de Dieu. On est déjà sauvé de quoi?
On est déjà sauvé du désespoir, sauvé de la culpabilité, sauvé de l’auto-incrimination, sauvé des pensées qui nous envahissent parfois de nous dire je ne sers à rien, je ne suis personne sur terre, je ne suis qu’un grain de sable dans l’eau.
J’ai été créée par Dieu, et c’est Dieu lui-même qui veut me sauver de mes pensées négatives. Alors évidemment, c’est assez paradoxal parce que d’un côté, on annonce ça, on proclame ça continuellement dans nos églises, et puis de l’autre côté, on met en place des systèmes qui culpabilisent les gens.
Évidemment, il y a un endroit où ça coince, mais il n’empêche que ça fait 500 ans qu’on essaye en protestantisme de porter ce message.
Faire des bonnes actions pour gagner son paradis
C’est sûr que c’est très bizarre à première vue pour une personne comme moi qui ai été élevée dans l’Église catholique romaine. Depuis aussi longtemps que je puisse me souvenir, il fallait faire de bonnes actions pour gagner son paradis. C’est ça qu’on disait.
Donc, l’admission à une présence de Dieu se gagne une action à la fois, c’est une liste. Et à la fin de ces jours, on peut démontrer qu’on a été une bonne personne à la suite de toutes ces actions-là.
Et je me souviens quand j’ai commencé à fréquenter les Églises protestantes, c’était très difficile parce que ça renversait complètement la façon de voir les choses.
J’ai le choix d’embarquer dans cette voie-là, c’est comme le train passe, je peux embarquer dans le train, ça me coûte rien et je peux me rendre à destination.
C’était très bizarre, c’était complètement renversé les choses. Et aussi, Ce qui fait que pour certains, c’est un concept difficile à assimiler, c’est qu’on est dans un monde capitaliste et ce qui a de la valeur coûte quelque chose.
Quelque chose qui ne coûte rien, quelque chose qui est donné, n’a pas la même importance que quelque chose qu’on a travaillé fort, on a économisé nos sous pendant dix ans, puis on peut finalement se l’acheter.
Toute cette notion-là d’un don gratuit de la part de Dieu, c’est vraiment, je dirais, quasiment contre-culturel pour plusieurs personnes.
La notion de bonnes actions à travers les groupes religieux
J’ai deux perspectives intéressantes aussi sur cette question des bonnes œuvres.
La première, c’est que j’ai découvert, il y a une dizaine d’années, lorsqu’on a eu toutes ces discussions discriminantes pour les personnes concernées sur le mariage pour tous en Europe, pour les fédérations protestantes des différents pays concernés, par exemple la France, la Suisse, l’Espagne, l’Italie.
C’était très délicat, avec d’un côté les progressistes et de l’autre les fondamentalistes.
Et la plupart du temps, ces fédérations protestantes ont décidé de se recentrer sur leurs œuvres communes. Par exemple, les hôpitaux, les centres d’accueil de FDF, les écoles chrétiennes, etc.
La plupart du temps, donc de 2012 à 2015, les messages qui étaient délivrés par les instances qui dirigeaient ces fédérations, c’était « Travaillons ensemble pour les immigrés, les exilés, travaillons ensemble pour les SDF, travaillons ensemble pour réduire les inégalités femmes-hommes, etc. »
Et donc, une façon de dire, eh bien, quand on n’est pas d’accord sur la façon d’appréhender ces questions sociétales, il faut, même si on est protestant, d’un seul coup, focaliser sur les œuvres. Les œuvres, c’est bien, ça.
Les œuvres, c’est là qu’on met des sous en commun et puis on aide les pauvres. Très bien.
Et la deuxième chose, c’est que quand j’étais adolescente, ici en France, j’ai vraiment été élevée dans un environnement qu’on appelait ça black-blanc-beur. Black, voilà, noir, blanc, beur, ça veut dire arabe, en verlan, et c’est essentiellement les arabos musulmans du Maghreb.
Et donc j’ai passé pas mal de temps dans ma jeunesse avec des jeunes élevés dans des foyers arabos musulmans issus du Maghreb.
Et il y a une chose qu’ils aimaient bien m’expliquer, c’est le concept de l’assanat. Donc l’assanat, c’est tes bonnes actions, elles sont comptabilisées et elles viennent contrebalancer tes mauvaises actions.
Donc, ce qui compte, ce n’est pas de ne pas faire de mauvaises actions. Ça, c’est pratiquement impossible. Et puis, quand on est jeune, on fait un peu des trucs.
Mais ce qui est bien, c’est de faire des doigts, des prières, de donner de l’argent aux pauvres et de contrebalancer les mauvaises actions.
Et c’était marrant parce qu’à l’adolescence, on est un peu dans une dynamique un peu comptable, c’est vrai. D’abord, on compte nos petits sous, on compte les petits copains, les petites copines, on compte plein de choses.
Et puis, j’avais des amis qui me disaient, tu sais, pendant le ramadan, il y a trois fois où je n’ai pas tenu, mais les trois jours qui ont suivi, du coup, j’ai rattrapé avec un quart d’heure, une demi-heure.
Et puis, je crois que c’est bon maintenant, c’est équilibré. Et moi, ayant été levée en régime lutéro-réformé, je trouvais ça ahurissant. On ne m’avait jamais parlé de la foi comme ça.
Et puis après, quand je suis allée vivre six mois en Israël, j’ai aussi découvert des pans du judaïsme avec les mitzvot, les bonnes actions.
Alors, ce n’est pas tout à fait la même comptabilité, mais il y a quand même cette idée de, il faut faire des bonnes actions parce que c’est comme ça qu’on garde la Torah, pour préserver la Torah, comme si c’était une personne.
Et après en cours, comme toi, en cours de théol, comme on dit en Suisse, j’ai eu mon introduction à l’hindouisme, au bouddhisme.
Dans ces religions orientales, il y a la notion de bonnes actions pour élever en quelque sorte ton niveau de sanctification, enfin peut-être là je parle un peu chrétien, et être réincarné dans quelque chose de plus noble.
Donc plus tu feras des bonnes actions dans cette vie que tu vis là, moins tu auras de chances de finir comme un asticot ou bien comme un cochon. Et puis après, moi je me suis dit, c’est pas possible, ça doit être des Occidentaux qui inventent des trucs, qui n’ont rien compris encore.
Quand j’ai eu la chance de faire une année d’études à l’étranger, j’étais avec des indiens dans mon dortoir d’étudiante.
Je leur ai posé des questions. Ils m’ont dit « c’est très important, il faut faire des bonnes actions, parce que le pire, ce serait vraiment d’être réincarné dans un moustique. »
Je me suis dit qu’il y a vraiment beaucoup de courants religieux qui mettent en avant le principe des bonnes actions. Et ça fait réfléchir, mine de rien.
Nos bonnes actions doivent-elles être visibles
Et ces bonnes actions doivent être visibles ou remarquées.
Au Québec, il y a un concours qui s’appelle la Coupe des bonnes actions, où des groupes de jeunes doivent faire quelque chose, s’inscrire au concours, et si leur bonne action est suffisamment bonne et spectaculaire, ils vont rapporter une vraie coupe, avec battage médiatique et prix et tout le truc.
Et c’est ça que je trouve bizarre. Faire des bonnes actions, oui, oui. Mais c’est le côté « Regardez, je fais de bonnes actions. Regarde, Dieu, je fais une bonne action. »
Ce que j’aime dans le monde religieux dans lequel j’appartiens, c’est que Dieu nous offre le choix de faire de bonnes choses, de créer un nouveau monde, de nous donner plein d’outils pour améliorer ce monde.
Et c’est à nous de choisir. On n’a pas cette espèce de coercition de « il faut que tu pries trois fois par jour, il faut que tu sois charitable, il faut que tu signes un chèque avec tellement de temps ».
Moi, j’aime penser que Dieu nous offre plan d’action et c’est à nous de choisir. Et Dieu nous dit, regarde ce chemin-là, moi je crois qu’il est bon, je crois qu’il amène beaucoup de vie.
Choisis, ne choisis pas, mais si tu prends ce chemin, tu vas créer quelque chose de positif, tu vas avoir le goût d’aider les autres, tu vas avoir le goût d’être généreux, tu vas être transformé.
Ce n’est pas une coercition, c’est une libération.
Le goût de suivre l’exemple du Christ
Je te rejoins vraiment sur l’aspect transformateur de se mettre à l’écoute de cette parole de libération, en fait. Il y a tellement de dictats dans nos cultures, dans nos sociétés.
Moi, j’estime en tant que femme, par exemple, sur la question de l’apparence physique. Et moi, je n’ai pas du tout envie de rentrer dans ces dictats.
Et l’une des raisons pour lesquelles je n’ai pas envie, c’est que je me dis que je suis libre et libérée par le Christ.
Après, c’est vrai que je regarde Jésus, un peu son itinéraire, et je ne peux pas m’empêcher de constater qu’il y a plein de fois où lui, il se serait abstenu de faire des bonnes œuvres, de faire des miracles.
Lui, il aurait voulu rentrer en relation avec les gens, leur délivrer un message et ne pas aller plus loin, parce qu’il y avait beaucoup de prophètes, il y avait beaucoup de guérisseurs à l’époque.
Il n’avait pas spécialement envie de rentrer dans ce modèle, mais c’était vraiment un attendu des gens.
Et donc, on a aussi une difficulté dans nos postures à nous, toi et moi, d’être engagés à la suite du Christ professionnellement. Et donc, on attend de nous, bien sûr, un niveau un peu plus élevé de charité, de bonnes actions.
Je pense notamment à notre paroisse à Sainte-Marie-aux-Mines, avec beaucoup de reconnaissance et de nostalgie.
On était au fin fond de la montagne, dans une vallée en fait, et parfois il y avait des gens qui atterrissaient là, je me demande toujours comment, et un peu en précarité, ils n’avaient pas tout de suite un endroit où loger.
Et c’est marrant parce que le prêtre lui-même avait pris l’habitude de nous les renvoyer. Et une partie du village, partie du principe que le couple pastoral, ils sont très gentils, ils ont des enfants en bas âge et plein de place.
Et de leur point de vue, on était plus habilités qu’eux à loger des personnes en errance pour une nuit alors qu’on avait des enfants en bas âge, donc ça ne fait pas trop de sens. Mais je comprends l’idée derrière.
Voilà, ça c’est quelqu’un qui a donné un peu sa vie au Christ et qui est censé faire plus de bonnes actions que les autres, montrer l’exemple en quelque sorte. Et Jésus lui-même était confronté à ces attentes-là.
Donc c’est vrai que c’est délicat parce que d’un côté, j’aimerais bien, parfois, être au-dessus du lot et montrer que oui, moi voilà, en tant que ministre, j’arrive à avoir un peu plus de patience, de temps, de douceur, de place dans ma maison que vous.
Et puis en fait, ce n’est pas tout à fait vrai parce que justement, en tant que ministre, on me sollicite déjà beaucoup sur ces aspects-là de ma vie.
Je trouve de plus en plus délicat de partir du principe que parce que tu es croyant, tu vas avoir des bons réflexes professionnels pour accueillir des gens qui sont en demande de quelque chose de très ajusté.
Et parfois, en faisant des bonnes actions, en fait, on entretient des systèmes qui ne sont pas bons. On donne des habitudes aux gens qui ne sont pas les bonnes et au gouvernement aussi, qui ne prennent pas du coup leur responsabilité.
Voilà, donc il y a la bonne action, et puis, il y a parfois aussi le revers de la médaille de faire ses bonnes actions. On crée des dépendances, on crée des loyautés, on crée des situations qui ne sont pas ajustées.
L’obligation des bonnes actions lorsqu’on est chrétien
Personnellement, je l’ai vu souvent, sûrement toi, sûrement les gens qui nous écoutent de croire que les gens religieux, c’est des spécialistes de la bonne action. On doit livrer la marchandise.
Combien de fois j’ai entendu vous, les églises, vous devez faire ci, vous devez faire ça. Oui, mais pourquoi toi, t’es pas capable de le faire également?
Pourquoi toi t’es pas capable justement de militer pour les sans-abri, de travailler pour construire un centre pour femmes en difficulté.
Tout le monde peut le faire ça, mais il faudrait que ce soit les Églises parce qu’on est des spécialistes au lieu de dire ben nous notre foi nous motive à faire ces bonnes choses et de retourner vers les gens, de dire, mais toi, qu’est-ce qui te motive à faire ces bonnes choses-là?
Tu parlais des ados tantôt, ça me fait penser, c’était un exemple que je leur donnais. Je leur disais, imagine ton meilleur ami, ta meilleure amie, ton BFF, ta best, échappe 20 dollars. Est-ce que tu vas le ramasser? La légende disait oui, les jeunes disaient oui.
Est-ce que tu vas leur redonner le 20 dollars? Ben oui. OK. Pourquoi tu redonnes le 20$ à cette personne? Est-ce que tu espères que ton ami va t’aimer plus ou c’est la bonne chose à faire?
Parce que vous avez cette relation, parce que vous avez cette intimité-là, vous avez passé à travers des épreuves, des joies et tu as le goût que la personne ne perde pas ce 20$-là, tu as le goût de montrer ton amour à ton ami. Quelle est ta motivation derrière?
Je veux pas acheter l’amour de Dieu, j’ai le goût de montrer à Dieu, d’une certaine manière, regarde, j’ai reçu une foi.
Tout est pas parfait dans ma vie, d’accord, mais quand même, j’ai le goût de faire quelque chose, puis j’ai le goût de l’envoyer vers toi, de dire, regarde ce que la foi que tu m’as donnée m’inspire à faire.
La performance et les bonnes actions
C’est intéressant parce que les bonnes actions, en fait, comme tu dis, c’est souvent celles qu’on voit.
Et ça me fait penser à une amie qui est religieuse consacrée à la communauté du chemin neuf et qui me disait qu’elle, à un moment donné, elle avait eu un grand poste de responsabilité.
Donc les gens souvent l’admiraient ou bien lui disaient qu’elle faisait un bon travail et qu’elle avait mis en place un système de roulement où les gens qui avaient des postes à responsabilité devaient une demi-journée par semaine aller faire la vaisselle à la cuisine, aller faire le découpage des carottes.
Et comme ça, ça libérait aussi un peu les gens de la cuisine qui pouvaient aller participer aux conférences. Elle s’était rendue compte qu’en fait, il y avait souvent un système qui fait que certains engagements chrétiens qui sont survalorisés.
Et puis derrière, celles et ceux qui permettent au système de vivre en fait, de survivre, ou bien qui mettent de l’huile dans les rouages sont fréquemment oubliés ou pas valorisés. Alors que probablement, le travail est parfois plus physique ou plus ingrat.
Et c’est un peu cette difficulté, c’est qu’en fait, on revient, enfin pour moi je reviens un peu à Martin Luther, c’est la raison pour laquelle c’est la grâce qui nous sauve.
C’est cet amour infini qui nous sauve, parce que si on devait tout le temps comparer les vies entre elles, ma vie avec celle d’un autre, si on devait partir du principe un petit peu de vivre au travers du regard des autres, au travers des dictates, ce serait toujours la désespérance.
Et ça, on le voit avec le phénomène TikTok et Instagram, c’est que les jeunes, ça crée une surenchère. Il faut être toujours plus ceci, plus cela, ou moins ceci, moins cela. Et ça amène à une sorte de désespérance.
Ça amène même à des systèmes de pensée où on finit par voler de l’argent aux parents, on finit par ne plus manger, on finit par prendre des risques, on finit par poster des fausses photos, on finit par voler des photos aux autres.
Et là, c’est quand on est tellement soumis au regard des autres. Et l’importance de la grâce, vraiment, c’est d’être libre et libéré, de ne plus être soumis aux dictates de ce monde, mais de vivre, de respirer cet amour de Dieu.
Alors, c’est à dire, quand je le dis comme ça, on dirait que j’ai tout compris ou bien que je maîtrise le concept. Mais en fait, non, je ne maîtrise pas le concept, mais c’est ce qui me sauve de la pression du monde, c’est d’y revenir assez souvent.
Et donc moi, la meilleure bonne action que je puisse faire pour le monde, en fait, c’est essayer d’incarner cette grâce.
Et quand j’y arrive, quand j’ai de l’énergie, quand j’ai du temps, quand j’ai de l’argent, quand c’est aussi un moment où je vais être juste avec les autres, eh bien, j’essaye d’être témoin du Christ. Et parfois, parfois, ça passe par une bonne action.
Ne pas devoir être parfait
J’adore ce que tu amènes parce que sans être fondamentaliste comme certains de nos partenaires en Église, moi je crois qu’à quelque part, Dieu a aidé à nous concevoir tel que nous sommes. Si Dieu a voulu à quelque part que je sois qui je suis.
Mon travail, c’est d’être qui je suis. Je suis suffisamment bon pour Dieu, je dois être suffisamment acceptable pour Dieu. C’est sûr que ça ne veut pas dire que je m’assoie sur mon derrière, je ne fous rien.
Encore une fois, je reviens à cette idée-là que j’ai ces dons, j’ai ces talents, j’ai ces capacités, j’ai des faiblesses, j’ai des défauts, mais comment que je peux utiliser tout ce que j’ai reçu, tout ce que j’ai, pour créer un nouveau monde, un meilleur monde, qui est dans le grand plan de Dieu, qui est le message que Jésus est venu annoncer. Un autre monde est possible. OK.
Donc, j’ai tout ça à ma disposition. J’ai le choix de l’utiliser. Et tu as très bien souligné ça, que ce soit visible, que ce soit invisible, ce n’est pas important. À la limite, moi je le sais. Et c’est déjà beaucoup. Et Dieu va le savoir, c’est déjà beaucoup.
Que ce soit reconnu, que ce ne soit pas reconnu, je comprends pour certaines personnes, il y a ce besoin-là. Je pense qu’on devrait aspirer à faire la bonne chose pour la bonne raison. Et si personne ne le remarque, ça va.
Ça me fait penser dans l’Évangile selon Luc, Jésus guérit dix lépreux, gratuitement, il ne demande rien en échange. Ils s’en vont, il y en a juste un qui revient.
Il n’enlève pas la guérison aux neuf autres. Il ne va pas au temple dire au scribe et aux prêtres, hé hé ouf, j’ai guéri dix lépreux là. Regardez-moi. Non, il a guéri dix lépreux. Il y en a un qui revient, dit merci.
Ça peut être simple comme ça la vie, parfois. On peut aider quelqu’un qu’on rencontrera jamais dans notre vie par un don, par un geste, par un boycott pour soutenir des travailleurs à l’autre côté de la planète.
Ça peut être aussi simple que ça, moi je le sais, Dieu le sait. Est-ce qu’on a vraiment besoin de plus pour être bien, pour être en bonne relation, pour bien vivre sa foi? Ultimement, je ne crois pas qu’on ait besoin de plus.
Conclusion
Donc, du coup, pas de hassanat, pas besoin de comptabiliser nos bonnes œuvres. Et cette certitude de la sola gratia. D’ailleurs, j’avais pensé à me faire tatouer sola gratia.
Et pour l’instant, tu vois, j’ai décidé qu’à chaque fois que j’ai un peu d’argent, je préfère faire quelque chose avec mes enfants que de me tatouer quelque chose que tout le monde pourrait voir.
Merci pour cette conversation sur un sujet important. Merci à l’auditrice qui nous a envoyé cette question, qui nous a donné un peu du fil à retordre quand on l’a préparée ensemble. Mais c’est bon, c’est bon pour nous, c’est bon de sortir notre zone de confort.
Effectivement, il y a des sujets plus faciles que d’autres, plus simples à expliquer que d’autres. Donc, merci pour vos questions, merci pour vos commentaires.
Continuez à nous écrire questiondecroire@gmail.com. Merci à l’Église unie du Canada de continuer à soutenir ce projet de podcast. Merci beaucoup, Joan. Et au grand plaisir de vous lire. À très bientôt, au revoir. Au revoir.
