Les écrits de l’apôtre Paul
Stéphane Vermette
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Beaucoup de chose ont été écrits au sujet de l’apôtre Paul? Était-il misogyne, radical ou bipolaire? Plus de 2000 ans plus tard, quelle place devrions-nous lui donner dans nos Églises?
* Musique de Lesfm, pixabay.com. Utilisée avec permission.
* Photo de Ben White. Utilisée avec permission.
Table des matières
Bonjour, bienvenue à Question de croire, un podcast qui aborde la foi et la spiritualité, une question à la fois. Cette semaine, que faire avec les écrits de l’apôtre Paul? Bonjour Stéphane. Bonjour Joan, bonjour à toutes les personnes qui nous écoutent.
Mais Stéphane, ça c’est une question qu’on t’a envoyée ou une question qu’on a décidée toi et moi? Je crois qu’on s’est imposé ce travail-là.
L’utilisation de Paul dans les débats sur le mariage pour tous
Ah ben quelle idée!
En tout cas, c’est vrai que j’ai eu une crise, une crise de foi. Toujours dans ces années un peu difficiles, les années 2012-2015, puisque c’était les années en francophonie européenne, où d’un seul coup, le fait que des personnes demandent l’égalité des droits au mariage et à la parentalité a déclenché des manifestations terribles de rejet de l’autre.
Parmi certaines de ces manifestations, il y a eu des homélies, essentiellement du côté catholique, mais aussi des prédications du côté protestant, des slogans terribles, des démonstrations théologiques assez, disons, farfelues.
Et très régulièrement, c’est ce brave apôtre Paul qui était cité, qui était utilisé comme en quelque sorte l’étendard de la famille hétéronormative, lui-même, je crois, si j’ai bien lu ma Bible, n’étant pourtant pas directement concerné par le fait d’avoir une femme, des enfants, une bonne, un chien, une villa et puis une grosse voiture.
Mais cependant, c’était lui qui était utilisé. Et alors, lors de cette crise de foi, j’ai fait un serment vraiment devant Dieu.
J’ai dit « Dieu, je ne lirai plus, à partir de maintenant, les épîtres de Paul, jusqu’à ce que tu m’envoies la guérison, la consolation, une façon de pouvoir de nouveau entrer en contact avec ces écrits bibliques-là.»
Et puis au gré des pérégrinations de ma thèse de doctorat, je me suis retrouvée une fois dans un colloque très intéressant qui a été organisé par l’Institut de théologie des Sèvres, qui est un institut jésuite qui se trouve à Paris, où il y a des personnes vraiment très pertinentes.
C’est vrai que pendant longtemps, les jésuites et les luthéros-réformés, ça n’a pas été des grands copains, mais on a ceux-là, je crois, en commun, qu’on a un attachement véritable à une lecture éclairée de la Bible et éclairante.
Et puis je me suis retrouvée dans l’un de leurs coloques, ils avaient une revue, je ne sais pas s’il y a l’existence encore, revue de sciences religieuses, un truc comme ça.
Et là, Elian Cuvillier, qui est un professeur de théologie biblique, enfin maintenant il fait de la théologie pratique, mais à la base c’est un bibliste, il a donné une conférence très intéressante sur Paul.
Sur le Paul qui finalement est toujours dans cette démarche du non-pas. Donc cette démarche de « vous ferez les choses mais non pas », « je suis mais non pas », toujours ce va-et-vient entre cette dualité interne de Paul, on dirait peut-être une personnalité un peu fracturée.
Il avait fait une conférence où d’un seul coup, parce que j’ai compris que Paul était aussi faillible que moi, aussi pénible que moi, qu’il pouvait avoir des jours d’errance et des jours où il était éclairé, je me suis dit que c’est comme ça qu’il faut que j’apprenne à lire les épîtres de Paul.
Il ne faut pas que je les prenne comme des paroles de Jésus, comme la parole de Dieu, mais que je comprenne que Paul est là pour me rappeler à la fois ma capacité à entrer en relation avec le divin, mais aussi combien je suis d’une nature humaine et influencée par tout mon vécu, mes traumas et ma culture.
Et voilà, par cette conférence-là, je me suis dit, ben voilà, c’est Dieu qui m’a pris par la main pour que je ne me coupe pas moi-même de cet effet miroir, en fait, que me faisait Paul, je pense.
Moi qui étais la grande défenseuse, inclusive, féministe et tout, je n’étais pas du tout comme Paul, vois-tu, eh bien finalement, quelque part, j’ai retrouvé mon chemin vers Paul et donc je me dis quand même, la théologie, ça sert à quelque chose parfois.
Une relation d’amour – haine avec Paul
Je comprends très bien ta réaction envers Paul. Je dois avouer, j’ai une relation amour-haine avec Paul.
Oui, Paul est souvent utilisé dans les débats sur l’inclusivité de l’Église.
J’ai fait quelques vidéos sur Jésus qui rejette personne et qui ne dit rien dans les Évangiles sur l’homosexualité. Et les messages que je recevais, c’était « Que fais-tu de Romain 1? »
Aussi, je trouve qu’en tant que pasteur, J’ai de la difficulté à prêcher sur les Épitres parce que j’aime bien raconter une histoire, raconter l’histoire qui se passe dans l’écrit biblique.
Donc, c’est plus facile pour moi, le Premier Testament, bon, David est à la telle place, il a fait telle chose, sa motivation était ci, était ça, la même chose avec Jésus.
Tandis que Paul, bon, c’est des longues phrases, des fois qu’il n’en finit plus.
Un professeur au collège théologique m’a un peu réconcilié avec le style, disant « Paul, il dictait ses lettres ».
Donc, un peu comme tout le monde, dans une conversation, des fois, on ouvre des parenthèses qu’on ne ferme jamais ou l’esprit part dans une autre direction.
C’est quand même difficile pour moi. Et un dimanche, si je prêche sur Paul, probablement que l’Évangile et le texte du Premier Testament ne m’inspirent pas du tout.
Paul le tonton de l’Église
Moi, je me rappelle d’un petit billet que j’avais écrit pour réforme.
En fait, Il y a eu un bouquin qui est sorti sur Paul, un bouquin qui a fait pas mal de retentissements.
Bon voilà, après chacun pense ce qu’il veut, ce qu’elle veut. Je n’ai pas très envie de donner le titre du bouquin ni l’auteur, je ne suis pas complètement d’accord.
Mais du coup, je ne comptais pas réagir là-dessus n’étant pas bibliste.
Mais comme je suis une théologienne féministe, une des journalistes m’a dit « Tu ne ferais pas un petit billet sur Paul pour donner un peu ton vécu, ton ressenti de théologienne féministe sur Paul? »
Et j’avais comparé dans ce billet Paul… à s’atténer dans la foi.
Tu sais, le tonton un peu de l’Église, on l’aime bien.
On l’aime bien d’abord, il est là, puis il est sympa, puis il fait des blagues pas toujours très appropriées, disons.
Mais il est là et puis c’est quand même un peu le premier à déplacer le sapin quand la période de Noël est terminée. Puis c’est un peu le premier, si une maman a les mains prises, à lui porter un bébé.
Enfin, il est sympa dans le fond.
C’est juste que sur certains sujets, qu’est-ce qu’il est lourd.
Des fois, quand il faut envoyer un délégué quelque part, il se propose parce qu’il a un petit peu de temps et des fois on a des retours où on n’arrive pas toujours à se sentir à l’aise ou aligné avec ce qu’il a dit lors de la réunion pour représenter la paroisse.
Mais après tout, il a sa place aussi dans la communauté.
Et moi, Paul, j’ai un petit peu ce rapport avec lui. C’est OK, il est là, il est dans la Bible, il apporte des bonnes choses.
Puis il y a quand même une grande partie de sa façon de discourir avec laquelle je ne suis pas à l’aise en fait, ça ne me représente pas.
Je suis d’accord que ce soit là, je comprends pourquoi, mais très peu pour moi.
Paul le révolutionnaire
Et en même temps, lorsque j’ai dû travailler sur Paul, j’ai découvert un côté un peu révolutionnaire.
Peut-être quelque chose avait connu avec mai 68.
Paul était un radical, il croyait au retour imminent du Christ, qu’un monde nouveau était pour débuter.
Et Paul avait cette idée qu’on n’avait plus de temps à perdre avec les divisions, avec les détails de ce monde.
Hommes, femmes, libres, esclaves, grecs, juifs, c’est plus important. On crée une nouvelle société, on crée un nouveau monde.
Et il y a un côté, oui, un peu extrême. Mais il y a un côté très attachant, quelqu’un qui va jusqu’au bout de son idée, jusqu’au bout de sa réflexion.
Peut-être que ce n’est pas ma tasse de thé, mais je peux voir qu’il croyait vraiment à ce qui s’en venait de ce nouveau monde, cette nouvelle façon d’avoir une relation avec Dieu, cette nouvelle façon de vivre sa foi.
Et je comprends que plusieurs personnes ont été inspirées par ce message, par cette personne qui devait avoir un charisme plus grand que nature, probablement.
Il y a quelque chose qu’il faut se réapproprier, je crois, en tant qu’église, ce côté d’ouverture.
L’histoire de la vie de Paul
Je te rejoins tout à fait dans le fait que Paul, à lire comme ça, notamment certaines épîtres, quand tu dois prêcher sur certains passages de Romains… Et donc du coup, à l’approcher comme ça… Ce n’est pas immédiat.
Il n’y a pas immédiatement quelque chose qui se passe toujours.
Par contre, quand j’ai raconté la vie de Saul Paul aux enfants en Godly Play, quand j’ai raconté aussi un peu toutes ces cascades, tout ce qu’il a fait avec son grand panier, toutes ces régates sur les petits coins de la Méditerranée, puis les différents endroits, d’un seul coup, je me suis dit Mais quand même, c’est quelqu’un d’admirable.
Pas sur tous les sujets et il n’arrive pas toujours à me parler. Il a un côté héros anti-héros en fait.
Ce petit côté héros anti-héros, c’est un petit peu comme si on commence à s’attacher à Paul, on se dit «ah mais vraiment il est cool, j’aimerais bien être comme Paul » et puis après il dit un truc, il fait un truc, et on se dit « non mais en fait c’est pas à Paul que je dois m’attacher ».
Et c’est peut-être ça qui sauve en fait toute cette relation. Et donc je suis toujours un petit peu gênée aux entournures quand je constate qu’il y a des doctrines d’Église qui sont fondées sur Paul.
Parce que moi j’ai l’impression que Paul n’est pas là pour qu’on fonde nos Églises sur sa pensée, mais qu’il est là pour justement nous titiller, nous amener à nous poser des questions là où ça dérange, là où le côté un peu lisse de Jésus, tu vois, ce côté un peu aimer tout le monde, être gentil, même si deux, trois fois il s’énerve un tout petit peu.
Mais globalement il faut aimer tout le monde, et puis ouvrir, et puis aller voir les pêcheurs, et tout, et tout. Il a moins ce côté lisse, en fait, Paul, et du coup ça nous titille un peu plus.
Paul et les communautés de foi
C’est vrai que Paul avait une réalité peut-être un peu plus complexe à gérer que Jésus.
Jésus avait ses disciples, ceux et celles qu’il suivait, c’était quand même relativement un petit groupe.
Paul a à gérer un chapelet de communautés de foi un peu partout dans la Méditerranée, et on remarque que plusieurs de ses lettres, c’est pour régler des problèmes.
Alors on peut facilement imaginer les gens de Corinthe lui écrire « Paul, que doit-on faire lorsque ci et ça se passe? » ou « Pourrais-tu dire à telle personne de partager son argent avec les autres? »
Et Paul de dire, bon, encore une fois, je vous écris parce que blabla, blabla, blabla, blabla.
Dans le langage informatique, on appelle ça du troubleshooting. On essaie de débuguer le système.
Il y a des choses naturellement qui ne s’appliquent plus de nos jours, qui est moins pertinente.
Il y en a d’autres : être généreux, accueillir tout le monde, je pense que ça passe à travers les siècles.
Et c’est peut-être ça un des problèmes qu’on a dans nos églises, c’est qu’on lit souvent Paul à travers le prisme d’un lectionnaire ou à travers le prisme d’études de théologie. Mais rarement, on va lire la lettre au complet. Rarement, on va prendre le temps de remettre ça dans le contexte.
Un exemple, on dit souvent Paul, c’est contre les femmes. Mais lorsqu’on prend le temps de lire le début, les fins de ces textes, surtout les épitres qu’il a écrits lui-même et non pas les épitres qui lui sont attribués, on trouve des femmes partout : Julia, Prisca, des femmes d’affaires, relativement importantes comme Lydie, comme Chloé.
Elles sont souvent nommées au début de lettre, à la fin de la lettre, des salutations spéciales.
On se rend compte que ce sont des femmes actives, impliquées dans leur société, qui sont généreuses, qui le subventionnent ses voyages missionnaires, elle lui offre l’hospitalité.
Sans ces femmes, Paul n’aurait jamais été capable de faire le début de tout son travail missionnaire.
Donc Paul avait une bonne relation avec les femmes, mais j’ai l’impression que c’est par après qu’on se dit « bon, mais non, ça c’est pas important ça, ce passage-là. Non, le vrai bon passage pour l’Église c’est ceci, c’est cela, la théologie et tout ça. »
L’épine dans la chaire de Paul
Je suis assez d’accord sur le fait que, pour moi, Paul il est clairement misogyne, sur plein d’aspects, mais, et ce « mais » est très important, je pense qu’il savait discerner les charismes. qui se disait, il y a quand même des personnes, des femmes qui sont capables.
Et ça, c’est très important, surtout à cette époque-là, parce que discerner des charismes en 2000, presque 2500, bon ben ma foi, si on ne le fait pas en Église, ça va s’arrêter tout seul.
Mais à son époque, il y a à peu près 2000 ans, franchement, c’est louable. Il y a autre chose que je trouve touchant chez Paul, c’est lorsqu’il évoque l’épine dans sa chair.
Et par rapport à l’épisode qu’on a fait sur la santé mentale, la dépression, je trouve ça hyper intéressant de se dire que Paul, c’était quelqu’un qui vivait avec quelque chose qui le handicapait, qui le gênait, qui le troublait.
Dans certaines théologies queer, bien sûr, des relectures ont voulu imaginer, essayer de projeter là-dedans, de se dire, mais est-ce que Paul était queer ? Peut-être est-ce que c’était ça l’épine dans sa chair?
Dans certaines théologies du handicap, on se dit peut-être qu’en fait, Paul avait un handicap. On ne sait pas lequel, quelque chose lié à son épaule, justement.
Je ne sais pas si on dit encore bipolaire, on ne dit peut-être plus ce terme, c’est peut-être plus un terme qui est honorant, mais une personnalité avec des hauts et des bas, avec des changements d’idées brusques, c’est un petit peu caractéristique chez lui, de changer brusquement d’idée sur certains sujets.
Et donc, moi je trouve ça émouvant et touchant qu’il en parle et qu’il le dise.
Et c’est vrai qu’il y a aussi ces moments où il s’appelle lui-même l’avorton, c’est ça je crois, l’avorton du Seigneur.
Et c’est aussi un peu caractéristique des personnalités un peu intenses, qui d’un côté sont finalement des personnalités assez leadeuse ou comme ça, un peu charismatiques, mais qui après disent « non mais je ne sais rien, je ne sais rien faire, je ne peux rien faire » et qu’il faut rassurer.
La normalisation de Paul avec le temps
Et ce que tu dis là peut-être explique comment les disciples de Paul, comment les gens qui l’ont suivi, qui ont écrit en son nom, ont tenté d’égaliser les choses, de ramener les choses vers les normes de la société.
Ce n’est pas Paul qui a écrit ça. Mais on sent que le patriarcat, un peu après, dit « bon là, Paul a peut-être déconné, il a peut-être allé trop loin, on va ramener ça dans les normes de la société qui est acceptable. »
Et je crois que peut-être on fait mal notre travail, peut-être, les Églises, de rappeler tous ces épîtres, traditionnellement attribués à Paul, mais qui ne le sont pas : Colossiens, Éphésiens, et ainsi de suite.
Les meilleurs théologiens aujourd’hui, les plus sérieux, ça n’a rien rapport avec Paul.
C’est des gens qu’on crée après et justement, on normalise les choses, on aplanit les choses parce que Peut-être Paul avait ce côté-là un peu dans les extrêmes, peut-être comme Martin Luther.
C’est peut-être un des grands traits des grands leaders historiques de l’Église chrétienne, peut-être, je ne sais pas.
On a voulu l’effacer, ou du moins l’atténuer, pour que ce soit digestible, pour que ce soit dans une bonne Église, dans une bonne paroisse, On écoute ça, on a des belles réflexions sur la grâce et des choses comme ça, puis on se dit « ah, c’est beau », mais peut-être qu’on y perd au change.
Paul et la théologie queer
J’aimerais du coup parler un petit peu de Linn Marie Tolstade, qui est cette théologienne présente très bien la théologie queer, qui l’enseigne d’ailleurs dans ses cercles à elle, je ne sais plus si elle l’enseigne dans les pays nordiques ou bien en Amérique du Nord, mais en tout cas.
Son livre a été traduit en français, donc ça s’appelle théologie queer.
La couverture vaut le déplacement. Je suis un petit peu dubitatif sur ce genre de couverture qui fout un peu effet d’annonce.
Mais en l’occurrence, elle a tout un chapitre sur le fait qu’il faut arrêter maintenant de faire de l’apologétique quand on fait de la théologie queer.
Il faut se libérer aussi de ce besoin de tout le temps se défendre face à, et elle parle de ce rapport étrange qu’on a justement aux écrits de Paul.
Notamment ceux qu’il n’a pas écrits, ce qui est encore de plus en plus loufoque là aussi, et de dire arrêtez de dire « Paul est nul et Jésus est génial » par exemple, ou arrêtez de vouloir expliquer dans les détails la question des viandes qu’on mangerait ou de la circoncision qui sera acceptée.
Elle fait une démonstration par l’absurde qui est très, très drôle et qui a fait mourir de rire le public auquel j’ai parlé des questions de théologie queer à l’antenne LGBTQ de Genève.
Parce qu’à un moment donné, elle fait une démonstration sur les questions de vie sexuelle, voilà, ne pas faire ceci, comme le passage, c’est… que les hommes ne vivent pas comme des femmes et les femmes ne vivent pas comme des hommes, etc.
Elle fait une espèce d’extrapolation qui est comique, où elle dit que les hétérosexuels ne doivent pas demander aux homosexuels de vivre comme des hétérosexuels, tout comme les homosexuels ou les personnes queer ne doivent pas obliger les personnes hétérosexuelles à ouvrir leurs pratiques.
Et comme ça, on respectera l’épître de Paul. Alors là, il y a eu un fou rire, mais généralisé.
Et c’est vrai que c’est hyper intéressant de voir que l’écueil avec Paul, c’est justement le littéralisme.
C’est de se dire, je vais lire le truc et le prendre au pied de la lettre. Parce qu’en vérité, Paul, il ne savait pas tout à fait ce qu’il faisait.
Et les écoles de script qui ont suivi n’étaient pas non plus tout à fait précises. On cherchait une voix.
On sortait du judaïsme assez rigoriste pour arriver vers une annonce de l’évangile, mais on ne savait pas trop ce que c’était déjà, et Jésus en plus était mort, donc ce n’était pas tout simple de s’en sortir sans lui.
Et on cherchait une voie, et en cherchant une voie, on a voulu normaliser les choses, on a voulu avoir des écrits, on a voulu avoir des choses très solides.
Et d’un seul coup, quand on a des personnes qui sont très fortes, comme Lynn-Marie, elle peut montrer la démonstration par l’absurde.
Et il faut éviter absolument ça, il faut privilégier des troisièmes voies, des voies de côté. Et d’après moi, ce n’est que comme ça qu’on arrivera à vraiment honorer la complexité de la pensée de Paul.
Paul et la résurrection
Moi, le théologien qui m’a le plus influencé sur Paul récemment, c’est John Dominic Crossan. J’en ai parlé dans un épisode précédent. Mon théologien préféré après toi, Joan. Oh, le flatteur!
Et il expliquait d’une manière très intéressante que Paul était un pharisien.
Les pharisiens croyaient à la résurrection et sa théorie, sur laquelle il travaille depuis quelques années, est que Paul est celui qui a imposé ce concept de résurrection à l’ensemble du christianisme et comment sa compréhension de la résurrection était influencée par les pharisiens.
Pour les pharisiens, la résurrection n’était pas une résurrection individuelle, elle était une résurrection collective. Un peu le concept du jugement dernier, où tous les morts et les vivants reviennent pour être jugés.
Les pharisiens étaient quelque chose dans cette idée-là.
Donc, ça explique pourquoi Paul était convaincu que Jésus était pour revenir de son vivant.
Jésus ne pouvait pas rester seul. Il était le premier. Il a ouvert la porte. Les autres s’en venaient.
Et ça explique aussi peut-être le côté d’urgence de Paul. On n’a pas de temps à perdre. Ça s’en vient. On met nos vies en ordre. Tout va bien aller.
Et c’est avec le temps, les théologiens se sont rendu compte que Paul disait que ça s’est plus ou moins réalisé, du moins d’un point de vue de temps humain.
Certains diront que le temps de Dieu, 2000 ans, il n’y a rien là.
Mais présenté de cette façon-là, j’ai trouvé ça très intéressant comme présentation parce qu’on voit l’évolution de la pensée chrétienne, sachant que Paul est le premier auteur de la chrétienté, bien avant les évangiles, et comment il y a un lien entre une espèce de théologie juive et une théologie chrétienne naissante.
Et ça m’a aussi réconcilié avec Paul.
Ce n’est pas juste des grandes déclarations, il y avait quelque chose d’appliqué, il y avait quelque chose de concret à offrir aux gens et qui fort probablement explique pourquoi il a été si populaire, qu’il a eu autant de succès dans ses voyages missionnaires.
L’appel de Paul pour la jeunesse
Et moi j’aimerais bien terminer par une parole pour laquelle je suis reconnaissante de Paul, une parole qui me guide aussi dans mon ministère maintenant que je suis responsable cantonale jeunesse pour l’église évangélique réformée du canton de Vaud.
C’est en 1 Timothée 4, 12, quand il est écrit que « personne ne méprise ta jeunesse ».
Et je trouve ça très très beau qu’il y ait un tout petit bout de Bible qui dise ta jeunesse, ça ne doit jamais être un sujet de moquerie, ça ne doit jamais être un sujet d’être humilié, ça ne doit jamais être un sujet de t’empêcher d’agir ou de parler.
Je trouve ça très, très important pour les jeunes qui sont là. Et moi, je coordonne. Je ne sais pas trop ce que je coordonne.
Je sais qu’eux, en tout cas, ils me coordonnent pas mal.
Et puis, la suite, elle n’est pas facile. Et c’est vraiment le côté paulinien, quoi. Ça commence bien. Que personne ne méprise ta jeunesse. Et puis après, tout de suite, c’est la voix étroite.
Mais sois un modèle pour les fidèles, en parole, en conduite, en charité, en foi, en pureté. Je trouve que ça, ça résume bien Paul.
Au début, il te lance, tu dis ça, c’est pour moi. Et puis d’un coup, il te remet la voix étroite.
Voilà, comme tu dis, c’est un pharisien, il parle depuis son point de vue situé, et c’est beau aussi de s’honorer les uns les autres quand on parle de nos points de vue situés, même si maintenant il va falloir qu’on continue à travailler ses épîtres et à en faire quelque chose pour nos dimanches matins.
Conclusion
Merci Joan pour cette conversation. J’espère qu’on vous a titillé, qu’on vous a excité peut-être au sujet de Paul, du moins pour ceux et celles qui ont peut-être de la difficulté avec cet auteur de la Bible.
On voudrait remercier en terminant l’Église Unie du Canada, notre commanditaire, et attirer votre attention vers le site internet moncredo.org où il y a plein de réflexions pour approfondir sa foi et sa spiritualité.
Peu importe la plateforme sur laquelle vous écoutez, n’oubliez pas d’aimer, de vous abonner, de partager. Si vous avez des commentaires, si vous avez des questions, si vous avez des suggestions de thèmes, questiondecroire@gmail.com. Merci beaucoup Joan. Merci Stéphane. À très bientôt.
