Explorer sa foi

Une sac à dos, un bible et une couverture prêts pour un voyage pour développer une foi mature

Développer une foi mature

14 mai 2025
Stéphane Vermette

Stéphane Vermette

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Les Églises accordent beaucoup d’importance à l’enseignement de la foi aux enfants. Qu’en est-il pour les adultes? Doit-on continuer à accepter les notions apprises à l’enfance ou peut-on laisser la place au doute pour développer une foi plus mature?

Dans cet épisode, Joan et Stéphane reçoivent Jean-Baptiste Frémond de l’Église évangélique régionale du canton de Vaud.  Ensemble, ils partagent leurs expériences d’accompagner des jeunes et des adultes dans leurs cheminements de foi et explorent quelques pistes pour approfondir sa foi tout au long de sa vie.

Site internet: https://questiondecroire.podbean.com/

ApplePodcast: https://podcasts.apple.com/us/podcast/question-de-croire/id1646685250 

Spotify: https://open.spotify.com/show/4Xurt2du9A576owf0mIFSj 

Contactez-nous: questiondecroire@gmail.com

* Musique de Lesfm, pixabay.com. Utilisée avec permission. 

* Photo de Jessica Mangano, unsplash.com. Utilisée avec permission.

Bonjour! Bienvenue à Question de croire, un podcast qui aborde la foi et la spiritualité, une question à la fois. Cette semaine, comment développer une foi mature? Bonjour Stéphane. Bonjour Joan. Et bonjour à toutes les personnes qui nous écoutent.

Aujourd’hui, Jean-Baptiste Frémond est avec nous. Bonjour Jean-Baptiste. Bonjour Stéphane, bonjour Joan, bonjour tout le monde. Bonjour.

Jean-Baptiste, tu te présenteras en cours d’émission. Peut-être que tu diras un mot de qui tu es lorsque tu prendras la parole en premier.

L’adolescence et le rejet de la foi

Mais j’aimerais commencer cette émission avec la question de développer une foi mature, en quelque sorte, avec le bénéfice que l’on peut avoir lorsque nos enfants nous font certaines déclarations.

Je me souviens qu’avec mon mari, à un moment donné, je ne sais pas, on devait prier à table ou lire la Bible; enfin on faisait un petit rituel quotidien biblique. Et notre fille aînée, de façon très décidée, nous dit « Je ne crois pas en Dieu. Et alors? »

Et c’est là que c’est un petit test pour la foi. Est-ce que ta foi est assez mature pour supporter l’idée que quelqu’un en pleine préadolescence vienne comme ça te challenger devant ses deux petites sœurs, qui n’en loupaient pas une miette évidemment? Comment réagis-tu ?

Tu réagis de façon un petit peu explosive : tu lui dis « là maintenant on lit la Bible, tais-toi »

C’est super rigolo, parce qu’il y a eu un long regard entre mon mari et moi. Tous les deux, on a avalé notre salive, on a dit « D’accord, et maintenant, on va chanter un chant de Taizé ».

Et, ladite demoiselle, on l’a déjà reçue à Question de croire pour le podcast. Maintenant, elle étudie la théologie et finalement, elle a fait sa boucle.

Parfois, développer une foi mature, c’est aussi à un moment donné ne pas croire en Dieu. Et puis, développer une foi mature, c’est aussi être parent d’enfants qui ne croient pas en Dieu.

Très bonne anecdote, parce que nous vivons ça à la maison. Mon fils, à 15 ans, nous a déclaré qu’il ne croyait ni en Dieu, ni en religion, ni en tradition. Donc, je ne sais pas trop ce qui reste, mais bon, on accueille.

Mais toi, Jean-Baptiste, parle-nous un peu de qui tu es et qu’est-ce que ça dit pour toi développer une foi mature?

Le doute qui renforce la foi

En ce qui concerne la foi, je suis fils de pasteur, donc ça a été présent dans ma vie depuis ma naissance. Et tout au long de ma vie, j’ai évolué avec cette foi.

Et je dois dire qu’à l’âge de vos enfants, moi aussi il m’arrivait bien souvent de dire à mes parents que je ne croyais absolument pas en Dieu et tout ce qui va avec. Mais à mon sens, c’est une étape qui fait absolument partie du développement de la foi, dans le sens que, la foi étant quelque chose de très vivant, le doute fait forcément partie de cette dernière.

Il n’y aurait rien de pire que d’avoir un enfant qui ne pose aucune question sur sa foi, qui ne fait que suivre bêtement ce qu’on lui a appris au catéchisme.

Donc, à mon sens, la foi est pavée de doute, et c’est le doute qui fait qu’on peut se renforcer dans notre foi, mieux la comprendre, mieux se l’approprier. Donc ça ne m’étonne pas du tout que vos enfants vous fassent des petites crises ou des petites déclarations du genre.

Corriger ou accueillir le doute

Mais c’est vrai que finalement… ça dépend un peu de là où on est issu pour les questions de foi, c’est-à-dire que parfois je parle avec des personnes qui viennent de milieux dans lesquels le doute n’a pas sa place.

Et quand ces personnes ont des doutes, on leur donne des instructions un petit peu coaching, du style : prie plus, lis plus ta Bible, fait ceci, fait cela, comme si la solution ne se trouvait que dans des pratiques correctives.

Le doute se corrige avec des pratiques qui s’apparentent à la foi et qui finissent par habitude, par discipline, par devenir de la foi en quelque sorte. C’est marrant, c’est comme des programmes de musculation spirituelle.

Nous, dans les milieux luthéro-réformés, on vient plutôt de cultures dans lesquelles on est assez relax sur les questions de doute. On en a souvent parlé dans ce podcast, mais on pense souvent à nos collègues très, très libéraux qui disent oui à la résurrection de Jésus, mais…

Par exemple hier je parlais avec une collègue qui m’a dit que pour l’un de ses devoirs de théologie, il y a déjà plusieurs décennies, un prof lui a dit : vous remplacez « Jésus est ressuscité », mettez à chaque fois « Jésus a été réanimé ».

Voilà, tu peux aussi faire des études de théologie, traverser des années d’enseignement de théologie avec des profs tellement libéraux qu’ils vont gommer la résurrection et c’est ok. C’est ok dans le sens où ça fait partie des possibilités du paysage luthéro-réformé.

Remettre en question des principes religieux reçus à l’enfance

Je reviens à une de mes marottes sur la différence entre la religion et la foi. Dans ces mouvements de correction, dans ces mouvements de donner les bonnes réponses, je vois la religion, un système structuré, un système normalisé. Mais la foi, comme tu l’as dit, c’est quelque chose d’un peu plus fluide. La foi, c’est quelque chose qui évolue avec le temps. Il y a des hauts, il y a des bas.

Et je crois qu’il faut accepter de se mettre au défi. On reçoit un enseignement et à travers les aléas de la vie, il arrive parfois qu’il faut réévaluer ses positions, il faut se demander : est-ce que ça tient encore? Si je peux utiliser un mot que nos amis évangélistes adorent, parfois il faut déconstruire sa foi.

Donc, il faut être capable de se remettre en question et se remettre en question n’est pas un signe de faiblesse, mais un désir d’aller peut-être un peu plus loin.

On a cet enseignement qu’on reçoit en étant enfant, mais lorsqu’on grandit, on commence à se poser des questions. Je vais vous donner un exemple.

Dans le monde anglo-saxon, en Amérique du Nord, l’histoire de l’Arche de Noé, c’est très important pour l’enseignement des enfants. C’est les petites chansons, les animaux qui montent deux par deux dans l’Arche et c’est tellement beau.

Mais il arrive un moment où on réalise que Dieu élimine l’humanité et la création, sauf la famille de Noé. Et si on commence à avoir un peu d’imagination, on dit : mais toutes ces personnes-là, quoi, ils se sont noyés? Et ça, j’en ai déjà parlé, mais ça a eu une réception ultra négative.

Il faut commencer à réfléchir sur un Dieu qui a voulu exterminer la création. Qu’est-ce que ça dit de Dieu? Qu’est-ce que ça dit de nous?

C’est tout un pan de questions qui s’ouvre. Ça ne veut pas dire nécessairement que Dieu est un tortionnaire, un génocidaire, mais ces questions-là nous permettent d’approfondir notre foi, d’explorer un peu plus loin que les belles petites réponses qu’on a reçues pendant notre enfance.

La complexité de la Bible

Ça nous amène finalement à la complexité de la Bible et à ses différentes strates d’écriture.

C’est vrai que l’un des points forts, je trouve, des études de théologie, c’est quand on nous explique comment la Bible a été assemblée, qu’il y avait tous ces manuscrits, qu’il faut toujours faire des choix dans les manuscrits, ces choix du reste.

Lorsqu’on va par exemple dans le Novum Testamentum, dans les versions en grec, et qu’en bas on a la para-critique, et qu’on comprend que tel mot manque, mais qu’on en a déduit que c’était celui-ci, qu’on comprend que sur cette péricope, ce passage biblique, il y a au moins trois ou quatre options, mais qu’on a gardé l’option qui semble faire le plus de sens.

Une fois qu’on a suivi ce cours, et une fois qu’on est appelé aussi à naviguer dans la para-critique et à voir finalement si on arrive à faire de nouvelles traductions de la Bible en prenant d’autres alternatives qui existent aussi dans les manuscrits.

On est obligé de décoller d’une vision littéraliste de la Bible. On doit finalement quelque part rendre grâce que ce texte soit arrivé jusqu’à nous, et puis rendre grâce aussi qu’il y ait eu des gens pour faire des choix avant nous, même parfois si ce sont de mauvais choix; et puis il y a les traducteurs et traductrices bibliques, les réviseuses bibliques.

Heureusement qu’on a ces gens-là qui ont ce corps de métier qui nous perm et de redécoller un peu de certaines habitudes qu’on a prises en lisant la Bible et qui ne font plus tellement sens maintenant.

Cette distance fait grandir. Pour moi, c’est ça une foi mature, c’est de se dire : cette Bible, je l’aime. Ces textes me structurent et c’est surtout le fait de les lire en communauté qui me structure. Mais c’est aussi un livre très complexe et je dois à certains moments me rendre devant la complexité de la composition de ce livre.

La Bible : un livre vivant qui résonne toujours aujourd’hui

Je suis tout à fait d’accord, et même au-delà de relever la simple traduction, qui aurait pu être différente, je pense qu’il est essentiel aussi de rappeler que la Bible est un livre éminemment vivant, qu’il évolue avec son temps.

Et je rappelle qu’il est aussi essentiel pour nous, dans l’objectif d’avoir une foi mature et évoluée, d’être capables d’interpréter ces textes bibliques, non seulement en fonction de notre foi, mais aussi en fonction de notre époque. Un texte qui résonnerait d’une certaine manière il y a dix mille ans ne résonnerait pas du tout de la même façon aujourd’hui.

C’est un très bon point que tu apportes, je trouve, parce que le message de la Bible, c’est le message pour les êtres humains. C’est un message pour l’ensemble de la création. Ce serait difficile d’admettre que ce message a été figé il y a 2 000 ans ou 1 000 ans et qu’il n’y a plus rien à apprendre, qu’il n’y a plus rien à y découvrir, et que les interprétations sont terminées.

L’humanité évolue, les sociétés évoluent, les contextes changent. Je crois qu’il y a quelque chose que Dieu veut nous transmettre. Il y a une sagesse dans tous ces écrits. Développer une foi mature, c’est de dire, dans notre contexte actuel, quel est ce message, justement?

Une foi ancrée d’autres traditions

D’un autre côté, de mes nombreux séjours en Afrique dans le cadre de la collaboration inter-Église, je suis revenue aussi avec une compréhension beaucoup plus élargie de la foi, dans le sens où moi je viens d’un milieu luthéro-réformé assez rationnel sur un certain nombre de choses.

Quand les gens sont morts, ils sont morts par exemple. Quand les gens sont malades, ils sont malades. Parfois, ils guérissent. Parfois, ils meurent. Quand quelqu’un disparaît, il a normalement été ou enlevé, kidnappé. Ou dans le cas d’adultes, parfois, c’est parce qu’ils veulent disparaître. Ça leur appartient.

Quand quelqu’un devient un peu fou, c’est probablement qu’il a soit une maladie, soit un trauma. En tout cas, il a besoin d’aide. Normalement, la plupart du temps, quand tu as un problème d’argent, il va se résoudre une fois que tu auras travaillé ou bien hérité. Tu vas régler ta dette.

Et puis je suis entrée en contact avec des personnes qui avaient vraiment une foi très, très différente, qui pouvaient jeûner, jeûner des jours et des nuits et des jours et des nuits pour que leur dette soit réglée, par exemple.

Je suis aussi entrée en contact avec des personnes dont l’enfant avait disparu et il s’agissait de faire un certain nombre de choses pour que l’esprit qui a enlevé c et enfant le rende.

J’ai rencontré des personnes qui avaient une foi très, très forte liée à la mort par crise cardiaque, laquelle n’existerait pas. C’est toujours un sort qui est lancé. Et donc il s’agit de faire des prières pour réussir à se protéger de ce sort.

Je me rappelle tout précisément à Madagascar, sur la côte. J’étais dans un hôtel, enfin pas tout à fait un hôtel, une pension. Et puis, comme on était près de la mer, sur la porte de la penderie, il y avait marqué qu’il ne fallait pas porter du rouge ni manger des saucisses sur la plage.

Et ça, c’était un fady, ce qu’on appelle un fady, un interdit culturel. Parce que si tout le monde se met à porter du rouge et à manger des saucisses sur la plage, alors là, je disais à mes amis, vous n’avez pas idée du nombre de soucis qui peuvent arriver, parce que j’ai demandé ce qui risquait de se passer. Et puis, enfin, ce n’est pas la peine d’en parler. Ce sont vos pires cauchemars.

Donc, à ce moment-là, j’ai quand même rendu grâce de ne pas avoir un maillot de bain rouge, je dois dire. J’avais une robe rouge et du coup, je ne l’ai pas mise à la plage. Et puis, je ne savais pas trop où trouver des saucisses, donc c’était réglé comme affaire!!

Mais tout ça constitue leur système de foi, leur système de croyances, c’est ce qui les fait tenir ensemble et debout. Et moi, je n’allais visiter que des communautés chrétiennes. Pourtant, il y avait un certain nombre de ces interdits, de ces croyances, de ces convictions qui étaient là.

Et l’une ou l’autre fois, j’avais remarqué que si je parlais un peu de mes soucis, disons de santé ou quoi, la première réponse, si j’avais mal à la tête, ce n’était pas de prendre un Doliprane ou un Paracétamol, mais on me proposait de jeûner, par exemple. Ce qui, dans mon cas, accentue grandement le mal de tête. Donc, je déclinais poliment.

Mais néanmoins, je peux comprendre. Dans le sens où il n’y a pas un système de croyance qui soit meilleur qu’un autre. Et finalement, chacun grandit dans sa foi.

Une foi plus mature n’est pas nécessairement plus intellectuelle

Peut-être le défi pour nous, occidentaux, je pourrais dire, c’est qu’une foi plus mature, souvent correspond à une foi plus basée sur le savoir, une foi intellectuelle. Mais on peut devenir plus mature émotionnellement, on peut devenir plus mature au niveau de nos relations.

J’ai souvent vu des gens qui pouvaient citer la Bible par cœur et expliquer les logiques derrière la grammaire en grec ou en hébreu, mais qui se comportaient comme des personnes horribles.

Donc, est-ce que c’est une foi plus mature? Pour moi, une foi plus mature implique un plus grand alignement entre toutes ces choses-là.

Oui, le savoir, oui, comment on se comporte en société, oui, comment on se comporte avec nos relations et comment ce message-là, comment cette foi s’articule dans plusieurs aspects de notre vie.

Une foi à hauteur d’enfant

Pour moi, l’enjeu est de rester une enfant. En fait, grandir dans ma foi, c’est aussi relever le défi de rester une enfant. Une enfant pour recevoir le royaume, une enfant pour rester à hauteur d’enfant. Me rappeler que les enfants sont souvent plus bas que moi et puis moi je regarde depuis en haut.

Pendant la formation Godly Play, il y a quelque chose qui se fait et que je trouve très impressionnant : à un moment donné, les formatrices se mettent debout sur une chaise et elles nous parlent d’en haut. Et c’est hyper désagréable.

Elles nous disent : comment vous sentez-vous, et on dit mais faut arrêter ça, c’est hyper désagréable. Elles disent ah, mais c’est souvent comme ça avec les enfants. Et depuis que j’ai fait cette formation Godly Play, c’est hyper rare que je ne me mette pas à hauteur d’enfant en fait.

Des fois on ne peut pas, des fois la situation ne le perm et pas, on est chargé. Mais je me rappelle en fait qu’on n’a pas à surplomber les enfants et qu’eux, ils ne peuvent pas se mettre sur une chaise pour nous parler.

Finalement, ça me ramène à cette notion de royaume, accueillir la vie comme le royaume, accueillir la vie comme un enfant qui accueille le royaume, qui annonce le royaume.

Dans le Godly Play, j’aime cette notion de l’enfant théologien, l’enfant qui se demande si finalement redevenir tout petit-e, parce que c’est aussi comme ça que je peux être complètement désarmée devant Dieu.

Avoir une foi mature pour moi, c’est une foi qui reste à hauteur d’enfant.

Une foi d’enfant, oui. C’est peut-être aussi une foi un peu plus honnête vis-à-vis des rapports qu’on a à Dieu. Une foi d’enfant, mais peut-être que ça veut dire aussi une foi plus d’homme à homme. Une foi qui veut plus l’égalité, question qui fait partie de la maturation de la foi.

Ce sont des questions qui émergent peut-être une fois qu’on a fini notre catéchisme, qu’on a les bases et qu’on est sur notre propre chemin vers la découverte de cette foi.

Le catéchisme pour établir des bases

Pour toi, Jean-Baptiste, le catéchisme t’as donné un peu les bases de ta foi, ou bien t’as permis de revisiter les bases de ta foi ? Quel a été finalement le rôle du catéchisme dans ta foi de jeune adulte?

Disons qu’à mon sens, la foi s’inscrit quand même dans un cadre religieux. Avant tout, le catéchisme sert à poser ce cadre.

C’est-à-dire, en l’occurrence, vu que je suis protestant, c’est quoi le protestantisme? Quelles sont les valeurs du protestantisme? et pourquoi est-il une religion entre guillemets différente des autres religions? Quel est son axe global d’interprétation de la Bible?

Une fois qu’on a appris toutes ces choses, on peut creuser nous-mêmes à travers cette matrice de notre religion selon notre propre choix. C’est ça qu’à mon sens le catéchisme m’a apporté. C’est la possibilité d’avoir cette respection.

Continuer à développer sa foi à l’âge adulte

Je trouve qu’il y a un manque dans cette quête de formation continue dans la foi. Je crois que c’est un rôle pour les leaders d’Église, les pasteurs, les diacres, les agents de pastorale, de travailler les choses, d’expliquer les choses, d’offrir quelque chose qui va pousser la réflexion.

L’un des plus beaux compliments que je peux recevoir après une prédication de la part d’un paroissien, d’une paroissienne, c’est lorsque cette personne me dit « Tu m’as fait réfléchir ce matin. Je ne sais pas encore si je suis d’accord ou en désaccord avec toi, mais tu m’as fait réfléchir. »

Lorsque j’entends ça, que je pousse les gens à réfléchir, c’est mission accomplie; qu’ils ou qu’elles trouvent leur propre réponse dans leur contexte de vie. C’est ça, je pense, un des grands rôles de leader d’église, c’est d’inviter les gens à continuer leur cheminement, leur apprentissage.

C’est souvent un peu ce que je me demande aussi, c’est après les parcours de KT (catéchisme), souvent il y a un post KT, voir un groupe de jeunes, et on arrive à un moment donné où les personnes ont l’âge que moi j’avais lorsque je me suis mariée ou quand j’ai eu mon premier enfant.

Mais sauf qu’entre-temps 25 ans ont passés et que, déjà quand je me suis mariée à 22 ans pour être maman à 23, je faisais partie d’un pourcentage plus réduit que la génération précédente.

Mais là, maintenant, ce n’est plus du tout ça le modèle, il n’y a presque rien. C’est-à-dire qu’en fait, dans nos Églises luthéro-réformées, si tu veux continuer à grandir dans ta foi, mais que tu n’es pas particulièrement fan club du culte du dimanche matin parce que tu fais des trucs le samedi soir, disons, eh bien, il n’y a pas tellement de formules, il n’y a pas tellement d’endroits où aller.

Alors, tu peux continuer à aller au groupe de jeunes où voir arriver les post KT qui ont 16 ans, mais toi, ça y est, tu en as 23, 24. Et puis pourquoi pas? Mais on ne va peut-être pas faire le même programme pour des 16 ans que pour des 24 ans.

Peut-être que tu veux continuer à te nourrir, à te poser des questions, un peu batailler avec des ministres, des théologiens, les chercher un peu sur certains sujets de la Bible. Et ça n’existe pas trop. Qu’est-ce que tu en dis, Jean-Baptiste ?

Créer des groupes

Eh bien je dis que c’est à chacun qui ressent ce désir d’acter, de créer des groupes. Par exemple mes parents, vénérables cinquantenaires qu’ils sont… Ah bah là, là, attention là! Attention hein! Ils ne sont plus invités au groupe de jeunes, mais ils ont créé une petite équipe de lecture de la Bible.

Ils se réunissent tous les mois ou tous les deux mois, je crois. Ils partagent un moment sur un texte qu’ils ont lu, qu’ils ont décrit et qu’ils discutent ensemble.

Alors, c’est peut-être moins fun qu’un camp. Mais ça reste toujours une manière de faire évoluer sa foi, même si ça fait déjà bien longtemps qu’ils ont fini leur catéchisme, ils continuent d’essayer de maturer dans leur foi, dans cet apprentissage éternel.

C’est merveilleux lorsqu’on se crée ces espaces-là. Et c’est vrai que c’est triste lorsqu’on essaie de ségrégationner (pas au dictionnaire, mais on comprend!)les groupes parce qu’il n’y a aucune raison qu’un aîné, dans la foi, ne puisse pas apprendre d’un adolescent et vice-versa.

Il y a toujours cette idée que lorsqu’on a fait des études, on a quelque chose à enseigner.

Et Joan, justement, qui nous parle beaucoup du Godly Play, nous rappelle régulièrement qu’on peut apprendre de partout. D’un enfant, d’un adolescent, de votre collègue de bureau qui ne va pas à l’église, mais qui a une certaine spiritualité, qui a une certaine foi. On apprend toujours.

Je ne dis pas que c’est inutile d’étudier en théologie, mais ce n’est pas la seule façon d’apprendre.

Souvent il y a des gens qui ont des connaissances intellectuelles, ils ont des connaissances académiques, et il y a des gens qui ont des très grandes expériences de vie. Je pense que le danger, c’est de trop ségrégationner, de trop diviser.

Et peut-être c’est un rappel pour nous de forcer les occasions, de rechercher les endroits, les moments où on peut partager et apprendre l’un de l’autre.

Une méthode de catéchèse différente

C’est la raison pour laquelle j’ai été toute contente de découvrir la méthode de catéchèse qui s’appelle T’es où, qui a été créé par Agnès Charlemagne, laquelle est à Marseille. Enfin, on revient avec des vieux mots, là. On dit méthode et on dit catéchèse, et donc tout de suite, ça fait un peu ancien.

On confie parfois à Agnès des classes avec des enfants qui ne sont pas tellement épanouis, assis sur une chaise, et qui ont un tout autre vocabulaire parce qu’ils savent parler plusieurs langues, notamment la langue de la rue aussi.

Sa méthode, c’est de dialoguer avec les enfants et les jeunes. Elle distribue les dessins qui ont été faits par d’autres enfants pendant une séance précédente.

Donc en fait, elle leur dit, voilà, qu’est-ce que tu vois là sur cette feuille? Ah ouais, tu vois, quelque chose de triste. Dans la Bible, il y a des parties qui sont un peu tristes. Je pense, par exemple, au moment où Jésus pleure pour son ami Lazare.

Et puis, comme elle a distribué des feuilles et qu’elle a distribué des crayons de couleur et du papier aux enfants, les enfants commencent à dessiner. Et puis elle dit « Ah ben tiens, est-ce que quelqu’un veut bien lire ce passage biblique dont je vous parle? »

 et quelqu’un accepte de lire, ou bien ne veut pas lire et on passe la Bible à son voisin. Elle fait comme ça : elle les laisse être organiquement eux-mêmes, elle leur donne quelque chose à faire, observer un dessin ou en dessiner un autre.

Elle les laisse aussi faire des petites causeries, elle s’intéresse aux causeries, elle dit « Ah, de quoi parlez-vous ? Il y a une histoire d’amour? L’amour, c’est un sacré sujet dans la Bible aussi. Vous savez qu’il y a des histoires d’amour dans la Bible? »

Ce qu’on appelle catéchèse, elle l’appelle des interstices. Je l’ai vue en action, je l’ai vue faire, j’ai lu sa méthode. Je trouve que c’est merveilleux parce que ça nous montre bien que la foi est complètement vivante.

On accepte que les autres soient aussi vivants que la foi, ça donne quelque chose de très authentique dans quoi finalement on peut injecter des éléments qui nous permettent de choisir, de picorer, de prendre, de faire notre salade niçoise.

Donc elle arrive comme ça à avoir des classes d’enfants qui ne sont pas spécialement contents d’être là au catéchisme, mais qui ressortent en ayant l’impression d’avoir été entendu, d’avoir entendu les autres. Et en plus, ils créent des choses, ils créent des dessins.

Cette méthode-là, je la trouve très belle. Et ce « t’es où ? », ça vient d’où ? Ça vient de la Genèse, dans le jardin, dans le Grand Jardin, quand Dieu dit « t’es où ?» et on en est où dans notre foi ? C’est vrai, ça.

Laisser la place aux enfants

Pour rebondir sur ce que dit Joan, c’est vrai qu’au-delà des enfants, moi j’ai été un « Jacc » pendant très longtemps et encore maintenant, c’est-à-dire accompagnant pour les camps de catéchisme. C’est vrai que cette idée de laisser chaque jeune avoir son idée, sa manière de voir les choses, c’était vraiment central dans l’organisation de nos camps.

C’est pour ça que quand on avait des petits moments d’études de la Bible, c’était assez simple en fait. On lisait un passage et puis on avait peut-être 2-3 questions préparées, mais après, ça partait tout de suite en discussion, rien de plus.

On avait vraiment cette idée de ne rien imposer à nos jeunes, autant comme idée que comme interprétation, de laisser une très grande liberté qu’on pouvait retrouver comme par exemple dans la formation Théou qu’elle a évoquée.

Ça me semble absolument central pour revenir dans ce thème de maturité de la foi. C’est une discipline à apprendre au final.

Conclusion

Merci beaucoup, Jean-Baptiste, d’être venu sur ton service civil. Merci à vous. On est toujours content quand des jeunes viennent nous rejoindre sur le podcast pour rester dans de l’intergénérationnel. Et puis parce que nous on est quarantenaire et toi t’es cinquantenaire.

Et puis, comme d’habitude, envoyez-nous vos questions, vos réactions, vos demandes. Nous sommes à votre écoute.

Vous pouvez nous écrire par courriel, entre autres, questiondecroire@gmail.com. Je veux prendre quelques secondes pour remercier notre commanditaire, l’Église Unie du Canada, qui met en ligne un site internet moncredo.org qui relaie nos podcasts, qui aussi offre des blogs, des vidéos sur des grandes questions justement sur la foi et la spiritualité.

Merci Joan, merci Jean-Baptiste. Et à très bientôt. Au revoir.

Rassemblement de jeunes dans leur cheminement pour développer une foi mature
* Photo de Adrianna Geo, unsplash.com. Utilisée avec permission.

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