L’Église doit-elle demeurer neutre?
Stéphane Vermette
- Église Unie
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Pourquoi les Églises donnent-elles leur opinion sur un projet de loi? Doit-on attendre l’accord de l’État pour se prononcer? Est-ce que demeurer neutre a des conséquences?
Dans cet épisode, Joan et Stéphane se questionnent sur les appels à la neutralité, s’inspirent de l’exemple de Jésus dans les évangiles et expliquent la différence entre le concept de neutralité en France et au Canada.
* Musique de Lesfm, pixabay.com. Utilisée avec permission.
* Photo de Tingery Injury Law firm, unsplash.com. Utilisée avec permission.
Transcription:
Table des matières
Bonjour, bienvenue à Question de croire, un podcast qui explore la foi et la spiritualité une question à la fois. Cette semaine, l’Église doit-elle demeurer neutre? Bonjour Stéphane, bonjour aux auditorices. Bonjour Joan, bonjour tout le monde qui est à l’écoute.
Est-ce que l’Église doit demeurer neutre ?
Ça, c’est quelque chose que j’ai pas mal entendu concernant la bénédiction des couples de même genre, qui est un sujet qui m’a occupé pas mal d’années.
Et lorsque je demandais aux différentes instances protestantes en France qu’on puisse en débattre de façon ouverte, pluraliste, de façon publique aussi, souvent on me disait mais non, mais tu vois, comme c’est pas encore autorisé par l’État, on va éviter ça, on veut quand même garder une certaine neutralité, ce qui est important d’abord. c’est de respecter la loi.
Et moi, dans mon petit cerveau de théologienne, je me disais, mais depuis quand la confirmation a été autorisée par l’État ? Ça ne nous empêche pas d’en faire.
Et là, comme c’était un sujet un peu touchy, un peu délicat, d’un seul coup, il fallait qu’on fasse preuve de réserve et qu’on attende très sagement que l’État tranche pour qu’on puisse se mettre à réfléchir théologiquement et publiquement à la question. Donc moi je me méfie un petit peu de cette neutralité qu’on utilise finalement comme un cache-misère.
Limiter la neutralité à certains sujets
C’est très pertinent à la réflexion même si nous venons de deux Églises différentes. C’est quelque chose que j’entends aussi et c’est ce que j’appelle la géométrie variable.
Certains sujets, il faut s’impliquer, il faut appeler ou écrire à nos députés, à nos représentants. Il y a d’autres sujets, ah là, il ne faudrait pas toucher à ça.
L’un des exemples avec l’Église Unie du Canada, c’est la question, je pourrais dire, israélo-palestinienne. Et l’une des choses qui revient souvent, c’est pourquoi on se soucie de ça, pourquoi on fait de la politique.
Récemment, le secrétaire général de l’Église unie du Canada a écrit une lettre au premier ministre canadien au nom de l’Église demandant de suspendre les relations avec Israël jusqu’à ce qu’il y ait une enquête sérieuse sur le dossier qui était accumulé par la Cour internationale de justice pour ce qui se passe à la bande de Gaza.
Et il y a eu une grosse réaction. Naturellement, on voit les images de la guerre, les gens sont touchés. Oui, c’est tragique ce qui se passe à la Bande de Gaza. Les enfant meurent, mais on sent qu’il y a le « mais ». Pourquoi on prend position, il y a les deux côtés de la médaille, on devrait rester neutre.
Les buts derrière notre neutralité
Pour moi, en fait, la prétendue neutralité, c’est une question de pouvoir aussi, finalement. C’est-à-dire que souvent, en fait, on se dit neutre pour ne pas se mettre à dos les gens qui ont du pouvoir.
Et typiquement, là, quand il s’agit d’un conflit géopolitique, c’est assez complexe, je trouve, d’arriver à porter une parole qui disent qu’il y a eu des massacres de part et d’autre. Et comme on n’est pas là pour se poser en juge moral de qui a commencé quoi, qui a fait qui quand…
Je sais que maintenant tout le monde est devenu expert en géopolitique du Moyen-Orient, comme avant l’Ukraine. On ne savait même pas où était l’Ukraine. Après, on était tous des spécialistes sur l’Ukraine et avant sur la Syrie, pareil.
Mais en l’occurrence sur des conflits territoriaux qui sont bloqués pour plein de raisons qu’on ne va pas lister. Choisir la neutralité, il ne faut pas se le cacher, c’est aussi choisir de se mettre à l’abri d’enjeux de pouvoir.
Et prendre position, ça peut être parfois, comment dire, ça peut parfois créer du mal sans créer du bien, parce que, par exemple, sur certaines prises de position qui ne sont pas suivies d’actes, je me demande toujours qu’est-ce que ça apporte aux gens sur place, en fait.
Puisque là, par exemple, on peut dire c’est un massacre qui est en train de se passer sur la bande de Gaza, c’est juste. On va arrêter d’avoir des relations avec Israël. Mais pourquoi est-ce qu’on fait ça ? C’est parce qu’en fait, on ne peut rien faire d’autre.
C’est parce qu’en fait, on ne peut pas les aider les Gazaouis. En fait, on ne sait même pas à qui envoyer de l’argent. En fait, on n’a pas envie de donner de l’argent à l’Égypte parce que c’est un gouvernement véreux.
Donc en fait, comme on ne peut rien faire de constructif pour aider les gens, on va dire plutôt qu’on va casser une relation. avec un interlocuteur sur place qui lui-même éventuellement souffre à ses problèmes, se remet lui-même d’un massacre.
Et c’est là que moi je suis un peu perdue dans ces questions-là. Je suis autant perdue par la prise d’opposition que par la neutralité et en même temps je comprends que tout le monde a envie d’avoir l’impression qu’il ou elle fait quelque chose.
Les moments où la neutralité n’est pas possible
Et la neutralité, c’est souvent la position confortable. J’ai eu le privilège de rencontrer plein de gens, des partenaires qui disaient parfois, nous, on n’a pas le luxe de demeurer neutre. Et ça fait réfléchir.
Nous, c’est facile d’être neutre. On est dans un pays occidentaux, on a des ressources. J’ai un toit au-dessus de ma tête. Je suis protégé par une constitution, par des lois, par les forces de l’ordre. On a parlé des conflits qu’on connaît.
Et il y a tellement de conflits qui sont oubliés, qui ne font pas les nouvelles. Ces gens-là sur le terrain, faut qu’elles survivent, faut qu’elles trouvent moyen d’opérer leurs activités et n’ont pas ce privilège-là de dire « moi je m’en mêle pas, j’essaie d’être au-dessus de la mêlée » parce que ça fonctionne. Ne fonctionnent pas. Ils vont subir des conséquences.
Même la neutralité entraîne des conséquences. Il faut rester conscient de notre privilège de ce côté-là.
La neutralité selon Jésus
Et c’est vrai qu’en fait, moi, je n’ai jamais considéré Jésus comme quelqu’un de neutre. Donc, c’est vrai que c’est une vertu qui m’échappe un peu, même si sur certaines questions, elle me plaît.
J’ai toujours trouvé que dans tout ce qu’il faisait, il était engagé. Il avait l’air de prendre un parti des fois à contre-courant de tout le monde, par exemple quand il parle avec des collecteurs d’impôts, quand il a des prostituées qui le suivent, etc. Des choses qui sont encore maintenant, qui posent question à certaines églises, à certains partis, à certains courants.
J’ai l’impression que Jésus était du genre à prendre position, à être prêt à être mis en question, comme on le voit avec la femme qui dit que même les petits chiens mangent les miettes quand ils essayent de la rabourrer. et qui était d’accord aussi de changer d’opinion.
J’ai l’impression que Jésus incarne bien ce que me disait souvent mon père quand j’étais ado et que j’étais parfois un peu survoltée. « Ouais, mais t’as vu, les gens changent d’avis tout le temps. » Il me disait « Il n’y a que les cons qui ne changent pas d’avis, Joan. Changer d’avis, c’est sain, c’est bien. »
Dans la vie, il faut être amené à changer d’avis. Moi, c’est vrai qu’en tant que pasteur, ministre, engagé dans l’Église, j’ai toujours trouvé ça bien d’avoir des convictions.
Et la majorité du temps, j’ai remarqué que ça dérange, qu’en fait, effectivement, on a des systèmes qui nous encouragent à produire une espèce de fausse neutralité, comme les gens qui disent « je ne juge pas, je ne suis pas à sa place ». Alors ça, je trouve ça toujours assez épatant.
Ou bien « je ne me prononcerai pas, je n’étais pas là ». Alors là, tu ne peux pas te prononcer sur grand chose parce que tu n’es souvent que dans ton truc à toi, donc c’est un peu compliqué.
Ou bien les gens qui disent « ne nous emballons pas, il ne faut pas réagir à chaud ». Du coup, tu passes ton temps à réagir en décalé à des trucs qui sont arrivés il y a super longtemps, parce qu’il faut quand même beaucoup d’historiens pour relire l’histoire, pour comprendre ce qui s’est vraiment passé.
Moi, je n’ai jamais très bien compris cette espèce de mesure qu’on nous demande absolument d’avoir en tant que ministre du culte, alors que notre guide suprême, notre exemple absolu n’avait pas l’air d’être quelqu’un qui attendait d’avoir eu plusieurs rapports de l’ONU pour se prononcer sur si c’est un massacre ou pas.
La neutralité n’est pas synonyme d’indifférence
Souvent j’ai l’impression qu’on confond neutralité avec plein d’autres concepts. Être neutre, ça veut pas dire nécessairement être indifférent. Parce que c’est facile d’être indifférent lorsque ça nous touche pas, on s’en fout, tout ça.
Être neutre, ça ne veut pas dire non plus de pas vouloir adopter une position, parce que moi je crois Même inconsciemment, on a toujours une position. Elle n’est peut-être pas bien formée, elle n’est peut-être pas éclairée, elle n’est peut-être pas aboutie, mais je pense qu’il y a une base de position.
Et comme tu as dit, avoir un esprit ouvert, ça ne veut pas dire considérer. Tous les options et donner la même force. Oui, on peut écouter qu’est-ce que l’un dit, qu’est-ce que l’autre dit, mais si on me dit, quelqu’un me dit la terre est ronde, l’autre me dit la terre est plate, je peux écouter, mais je peux pas dire, ah moi je me prononce pas, je suis neutre. Non, on sait que la terre est ronde. Désolé s’il y a des personnes à l’écoute qui croient pas ça, je pense qu’on a assez de preuves pour ça.
Donc, d’avoir une position qui ressemble à celle de Jésus à quelque part, parce que Jésus avait ses opinions.
Ce qu’on lit dans la Bible, il y a beaucoup de conversations avec les pharisiens, les sadducéens et tout ça. Je les aurais pu dire, j’ai le langage, mais l’équivalent de « c’est des cons, je m’en fous d’eux, je leur parle pas ». Il y a quand même un échange. Ils ne sont pas d’accord, mais il y a quand même un échange. Tout à fait.
Mais il n’a pas dit « Ah, moi je suis neutre, je respecte les deux positions ». Non, Jésus dit « Moi, je pense que c’est ça, je suis prêt à t’écouter, je suis prêt à discuter, mais… »
Et c’est ça, je pense, qu’on confond. Est-ce que l’Église peut être neutre ? Ou est-ce que l’Église peut écouter, se renseigner, discerner, évoluer et dire « Là on est rendu à telle place, on croit que c’est ça la bonne décision, peut-être qu’on se trompe, peut-être dans cinq ans on va changer d’idée, mais où est-ce qu’on en est, c’est là. »
Suivre l’exemple de Jésus
Et puis après, il y a aussi cette question de Jésus qui nous demande de faire advenir la justice, qui nous rend attentifs et attentives à la veuve qui réclame tous les jours au tribunal auprès du juge pour obtenir justice, ce qui est l’un de mes passages favoris dans la Bible, comme tu t’en doutes.
Il y a une tension en fait entre les deux, entre tout ce qui se passe en fait, sur lesquels on n’a pas de prise et faire semblant d’être neutre ou engagé, ce sont plutôt des postures que des vraies actions.
Et puis aussi cet appel très fort que nous lance Jésus de faire advenir la justice.
Et on est là entre les deux, et on ressemble vraiment à cette balance, finalement, de la justice, où on essaye d’équilibrer, comme tu disais, un peu entre ces deux éléments, et justement de ne pas se poser ni en juge ni en justicière, en fait.
Ça me rappelle un peu une anecdote. Il y a un pasteur qui m’a raconté que suite à l’arrivée des Ukrainiennes en Europe, il y a deux ans et demi, il y a des situations un peu délicates qui ont apparu.
Par exemple, des hommes que vous vous appelez un peu les « incels », un peu des hommes qui n’ont pas de femme depuis longtemps et qui ont un certain nombre de frustrations, qui ont vu là l’opportunité d’avoir une femme.
Et puis, des femmes qui ont vu là l’opportunité de sauver leur gamin. On va aussi parler des choses très basiques de la vie. et qui ont passé des espèces d’accords qu’on ne peut pas juger en fait, parce que tant qu’on n’est pas concerné, on n’en sait rien du tout.
Évidemment, il y a des femmes qui, une fois qu’elles ont trouvé une zone de confort, elles ont dit à ces bonhommes-là, écoute, merci beaucoup de nous avoir fait venir.
Et donc arrive là l’histoire, on va dire, de Jean-Michel, pour caricaturer un peu. Qui avait loué un gros camion, avait traversé toutes les frontières jusqu’à la Pologne, avait récupéré sa dame ukrainienne rencontrée sur le net, avait chargé les gamins et quelques trucs qu’elle avait réussi à sauver, l’avait ramenée en Alsace et s’était dit, ça y est, j’ai fait la bonne action de ma vie.
Il avait vécu une aventure aussi. Maintenant, j’ai une femme.
Et la dame, au bout de quelques mois, elle s’est rendue compte que Jean-Michel et elle, en fait, c’était pas une histoire qui pouvait durer.
Et donc, cette femme était venue demander de l’aide au pasteur parce qu’elle avait besoin d’être relogée. Et Jean-Michel avait trouvé ça dégueulasse que le pasteur prenne partie pour la dame.
Et là, il y avait eu plein plein de discussions à plein de niveaux. Parce qu’alors du coup, il y avait ceux qui étaient du côté de Jean-Michel, mais il y avait aussi ceux qui étaient du côté de la dame. Il y a même des gens qui ont reproché au pasteur d’avoir discuté avec Jean-Michel.
On arrivait à une espèce d’ambroglio incroyable où le pasteur aurait dû… se poser en donneur de leçons, en moraliste, en justicier, et où au contraire, il essayait de cultiver cette fois-ci, je trouve, une faible neutralité, de dire en fait, cette dame, elle est en désespoir depuis très longtemps, ce monsieur aussi d’ailleurs, mais ce n’est pas le même niveau de désespoir.
Et donc maintenant, elle a besoin d’être relogée parce qu’elle ne veut pas vivre avec Jean-Michel, que Jean-Michel attend d’elle des choses qu’elle ne veut pas ou plus lui donner.
Et donc moi, j’écoute tout le monde. Je ne prends pas vraiment partie, parce que c’est une histoire complexe, avec des arrangements et des loyautés, mais je vois qu’elle a besoin d’être mise à l’abri.
Et ça ne veut pas dire pour autant que je coupe le rapport avec Jean-Michel, parce que lui, a priori, il a aussi besoin de moi en tant que pasteur.
Ça avait provoqué d’énormes discussions. Et puis, lui, il ne comprenait pas. Il ne comprenait pas vraiment ce qu’on attendait de lui, parce que lui, en fait, il n’est pas là pour trancher.
Les demandes pour que l’Église demeure neutre
Ton histoire illustre la pression extérieure qu’on veut mettre sur l’Église, sur les pasteurs, sur les croyants.
Combien de fois on a entendu « Ah, toi t’es chrétien, t’es croyante, faut que tu te conduises comme ça ». L’Église, en général, doit se conduire de telle manière.
Au Canada, il y a un grand mouvement anti-clérical depuis des décennies et on utilise justement cette question de neutralité pour museler un peu l’Église. Pourquoi vous donnez votre opinion sur telle législation? Vous ne devriez pas être sur la place publique. La religion, c’est la sphère privée. Ce que vous faites dans votre salon, ça vous regarde. Ce que vous faites dans l’espace public, ça doit être neutre.
À ça, je réponds, pourquoi l’Église n’aurait pas le droit de se prononcer comme tout autre groupe social de la société? Pas s’attendre nécessairement parce que l’Église de Dieu se prononce que tout le monde se ferme, mais si un pasteur, si une église, si un ou une croyante a un point de vue, cette personne-là, ce groupe-là a le droit de l’exprimer comme tous les autres groupes.
La neutralité entre la politique et la religion en France
Et du coup, comment ça se passe ? J’ai l’impression que votre Justin, lui, il n’a pas du tout la même neutralité que chez nous, parce qu’en fait, la France est quand même culturellement un pays catholique, avec très peu de pratiques actuelles et plein d’autres questions qui se posent, mais qui appartiennent essentiellement aux catholiques.
Un pays qui a persécuté longtemps les protestants, et donc qui a une mémoire un peu traumatique autour de tout ça. On n’est même pas 3% de la population.
Les Juifs, les pauvres, ils sont même moins d’un pour cent avec tout ce qui leur est arrivé malheureusement. Le groupe de croyants musulmans, lui, commence à être dans les 8-10%, je crois.
Donc finalement, c’est un grand turnover. Il se passe des choses très différentes maintenant d’il y a 60-70 ans. Ce qui pour autant n’est pas alarmant, c’est juste la suite de la colonisation qui se vit maintenant de cette façon-là, qui donne une France multiculturelle.
Mais du coup, c’est assez étrange parce qu’on a un président qui, sur certains trucs, reste sur des héritages historiques. comme il est chanoine de je ne sais plus quoi, latran, je crois, chanoine de Saint-Jean de Latran, au Vatican, il a une place honorifique du fait de l’histoire.
Mais d’un autre côté, on a tendance à lui demander d’appliquer une laïcité stricte, alors que chez vous, moi, j’ai déjà vu le président qui s’en allait manger des petits gâteaux bouddhistes ou je ne sais pas quoi, ensuite il allait faire une prière musulmane ou je ne sais pas quoi, après il se mettait une qui passe sur la tête, enfin, ça a l’air d’être tout à fait différent ce qui se vit chez vous en termes de laïcité que chez nous.
La neutralité entre la politique et la religion au Canada
Oui, comme tu as dit, les politiciens voient les groupes religieux comme les groupes culturels. Ils vont visiter une mosquée comme ils vont dans un festival culturel tamoul.
Eux voient la neutralité qu’on traite tout le monde pareil. Donc on enregistre un message pour Noël chrétien, mais pour la Pâque orthodoxe et le Rosh Hashanah, et ça fait partie de séries de checklists.
On fait toutes les capsules d’un coup, tout le monde va être content, mais il n’y a pas cette réflexion de dire, pourquoi qu’on garde encore des liens avec l’Église? Est-ce que c’est pour acheter deux, trois votes ou il y a quelque chose de plus profond? Ça, on ne l’a pas, ça, ici.
J’ai rencontré des gens de l’Église unie qui ont une espèce de nostalgie d’une autre époque. On m’a parlé d’un conseil général des années 60. Le premier ministre du Canada a insisté pour venir parler aux délégués. Et maintenant, on n’a plus l’oreille du premier ministre. Que c’est triste.
En même temps, l’Église unie du Canada, depuis plusieurs décennies, se considère comme l’opposition officielle au gouvernement. peu importe le gouvernement, peu importe l’orientation, peu importe le parti, on critique le gouvernement, on est des justice warriors.
Une neutralité qui arrange parfois l’Église
Alors c’est vraiment très très intéressant parce que, tu vois, c’est pas du tout pour les mêmes raisons, mais moi, mon église de baptême. J’ai toujours entendu deux discours contradictoires mais qui s’expliquent très très bien.
Premier discours, les pasteurs n’ont pas à faire de politique. Les pasteurs n’ont pas à prendre position publiquement sur des questions politiques parce que ça pourrait blesser des gens dans leur assemblée et les pasteurs sont là avec le ministère d’unité. Donc là tu en es très très loin de l’église protestante unie du Canada.
Deuxième discours, si ce sont des sujets plutôt conservateurs, qui peuvent apporter du bien à l’Église, alors ça peut être intéressant de s’engager politiquement.
Donc le point commun des deux choses, c’est qu’est-ce qui est utile pour l’Église. On ne se demande pas ce qui est finalement juste en quelque sorte, on ne se demande pas non plus ce qui est stratégique. pour faire grandir la présence politique de l’Église, mais on se demande ce qui peut être utile pour conserver un statut quo, au sujet duquel tout le monde n’a pas l’air trop insatisfait.
Et je trouve qu’on est très très très très très loin finalement du positionnement de Jésus, même du positionnement de Paul. Deux personnes qui sont assez décidées, assez tranchées, Voilà, c’est quelque chose qui m’a toujours interrogée et qui continue à m’interroger.
Et pourtant, tu vois, en vieillissant, je me rends compte que c’est vrai que de dire publiquement « on ne veut plus parler à Israël » et « on est très fâchés à propos de Gaza », en fait, finalement, ça n’apporte pas grand-chose non plus, parce que ça ne change rien la situation des Gazaouis.
Donc, en vieillissant, je me rends compte que tous ces mots, tous ces concepts, Tout cet engagement, des fois, ne vale pas mieux qu’une certaine neutralité bien pensée.
La neutralité a toujours des conséquences
Tu parlais de ne pas prendre position qui va choquer les gens. Souvent, c’est vu qu’on demeure neutre, il n’y a pas de conséquences. Ce qu’on oublie, il y a toujours une conséquence. Il y a toujours une conséquence.
Au début, tu as parlé du mariage pour tous. Souvent, c’est ça qu’on a entendu. on ne prend pas de décision comme ça, il n’y a pas de conséquences. C’est simple. Moi, souvent, j’ai dit, mais non, l’absence d’action a des conséquences.
Moi, j’ai entendu des gens qui ont dit, si l’Église n’allait pas dans cette direction, je quittais, parce que mon frère est gay, puis ça rejette ma famille, des choses comme ça. Donc, il faut faire attention, justement, à cette idée de neutralité, d’absence de décision, c’est une décision quand même.
Donc je crois, tant qu’à subir des conséquences d’une part et d’autre, aussi bien prendre une position qui reflète ce que nous sommes, ce que nous croyons, c’est-à-dire, voici, nous assumons qui nous sommes,
Ça va peut-être déplaire à certains, mais au moins on essaie d’être honnête, on essaie d’être transparent, on essaie d’être authentique. Ceux qui trouvent que nous ne sommes pas neutres, tant pis.
L’importance d’affirmer qui nous sommes
Et l’exercice que d’affirmer qui nous sommes, essayer de mettre des mots sur notre identité collective, et ça c’est très difficile, c’est l’exercice de la rédaction de la confession de foi ou de la profession de foi.
Et là on va commencer à être dans les festivités de la confession de foi de Nicée-Constantinople. Et donc moi je trouve que c’est formidable d’être dans cette époque de l’Église.
On réfléchit au sens des mots, au sens des engagements qu’on prend les uns envers les autres, où on s’interpelle, où on crée du débat, de la disputatio. On n’est pas d’accord, mais c’est justement en n’étant pas d’accord qu’on est en tension et qu’on évite des fausses neutralités ou bien des fausses prises d’opposition.
Mais on est en mouvement et il y a quelque chose de très dialectique là-dedans. Je suis contente que du côté protestant, on ait cette tradition des professions et des confessions de foi.
D’ailleurs, peut-être qu’il y a des personnes qui nous écoutent aujourd’hui qui aimeraient bien nous envoyer leur prise d’opposition, ou bien leur moment de neutralité, ou bien encore leur texte qu’on pourrait une fois lire ou partager, puisqu’on va à un moment donné parler de cet anniversaire-là, de cette confession de foi très importante pour le christianisme.
Voilà, c’est peut-être l’occasion d’ouvrir un chemin, d’ouvrir une possibilité de discuter ensemble sur cette notion de prise d’opposition ou de neutralité qui est aussi une prise d’opposition, d’engagement de notre parole et de nos actes.
Conclusion
Et si vous trouvez que soit A, nous sommes trop neutres et qu’on n’ose pas assez, ou si B, on va trop loin et on devrait faire preuve d’un peu plus de neutralité, écrivez-nous ! Je sais que je reviens souvent sur ce sujet, mais c’est merveilleux d’avoir des gens qui nous confrontent
C’est toujours bien d’avoir des compliments et d’avoir des gens qui nous confrontent, qui nous disent ça Johan, ça Stéphane… questiondecroire@gmail.com. Merci à notre commanditaire, l’Église Unie du Canada.
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